Discours du ministre pour l'ouverture des CTPM1 et 2
(7 mai 2004 - 9h00)
Centre de conférences internationales
Merci beaucoup, Monsieur le Directeur, Monsieur le Secrétaire général, Mesdames et Messieurs les membres des Comités Techniques Paritaires,
Vous me remerciez d’être là, comme si c’était quelque chose d’exceptionnel. Non, vous n’avez pas à me remercier. Je regrette simplement de n’avoir pas pu être présent à la réunion qui était prévue le 31 mars. Mais je me souviens que c’était au lendemain de ma nomination, donc j’avais peut-être une circonstance atténuante. Néanmoins, pas trop tardivement, après quatre semaines qui ont été très occupées - je comprends que ce n’est pas fini - je suis heureux de participer à cette réunion et, si vous le voulez bien, de retenir votre attention, dans un propos introductif avant de vous écouter. D’emblée, je voudrais vous confirmer que cette présence, dans ces réunions statutaires, sera pour ce me concerne, la plus régulière possible. J’ai eu l’occasion de m’adresser à plusieurs d’entre vous, qui étaient présents avec une partie du personnel du Quai d’Orsay, le 1er avril dernier, au moment de la passation des pouvoirs entre Dominique de Villepin et moi-même, et j’ai d’ailleurs été heureux de l’ambiance qui, dès le premier jour de ma prise de fonction, existait, me semble-t-il, ce jour-là, dans cette communauté de femmes et d’hommes que j’ai l’honneur et la chance d’animer maintenant.
Vous me permettrez peut-être, Mesdames et Messieurs, puisque c’est notre première rencontre, de vous préciser que j’inscrirai naturellement notre action dans une continuité logique : nous travaillons tous dans le cadre d’une politique fixée par le Président de la République et, comme vous le comprendrez, beaucoup de points que je vais évoquer s’inscrivent aussi dans cette continuité d’orientation, de décision, de législation, engagée depuis plusieurs années parfois, en tous cas depuis de longs mois. Vous me permettrez aussi, au titre de la continuité des fonctions et des hommes, mais aussi à celui des relations personnelles, de saluer devant vous l’action et l’engagement de Dominique de Villepin. Il a eu à cœur de vous rencontrer, lui aussi, régulièrement, d’avoir un dialogue franc, nourri, et beaucoup de dossiers ont progressé. Je pense à des dossiers importants pour l’avenir de cette maison et la carrière, au sens le plus large, des agents.
Je voudrais également excuser le ministre délégué, Xavier Darcos, qui aurait voulu être ici aujourd’hui, mais que ses responsabilités ont appelé en Afrique Australe. Il a donc lui aussi des circonstances atténuantes. Son directeur de cabinet, François Perret, est ici pour le représenter.
Je viens de vous le dire, j’ai voulu, et j’en suis heureux, quelques semaines après ma prise de fonction, prendre contact le plus rapidement possible avec vous et vous écouter. C’est donc, avec la réunion de nos deux CTPM, une première occasion. Ce ne sera pas la seule. Tel est le premier engagement que je veux prendre devant vous. Plusieurs de vos organisations ont demandé d’ailleurs des rendez-vous et je recevrai chacune de celles qui le souhaiteront dans les prochaines semaines, dans un cadre un peu moins formel, un peu moins institutionnel, en tous cas propice à un dialogue direct, autant que mon emploi du temps me le permettra. Je serai dans cet état d’esprit de disponibilité pour avoir, au-delà et à côté des réunions formelles des CTPM, ce dialogue direct.
Nos rencontres prendront donc deux formes. Naturellement, cela n’interdit pas, comme il est d’usage dans une grande administration comme la nôtre, le dialogue et la discussion avec ou par l’intermédiaire du directeur général de l’Administration. Je veux en tous cas, Mesdames et Messieurs, que ce dialogue soit ouvert, régulier et transparent.
Quand je lis l’ordre du jour de ces deux CTP, ordre du jour que vous avez en grande partie défini vous-mêmes, je devine vos préoccupations. Je vais donc les évoquer le plus précisément, le plus clairement possible, qu’il s’agisse de l’évolution des ressources du ministère, des rémunérations du personnel, du passage à la LOLF ou du plan de réaménagement de nos réseaux à l’étranger.
Permettez-moi quelques mots sur les orientations politiques que je voudrais poursuivre ou entreprendre. Nous avons, sous l’autorité du Président de la République - c’est la règle sous la Vème République - à défendre une certaine idée de la France, de son rôle et de son influence dans le monde. J’ai quelques convictions très ancrées, que j’ai exprimées le 1er avril au moment de la passation des pouvoirs, et je voudrais vous les redire rapidement :
Je pense que notre pays doit garder cette capacité d’initiative, cette image, cette réalité d’une diplomatie de l’action, notamment pour contribuer au règlement des crises, mais aussi, au-delà des crises et de la conjoncture souvent dramatique, à la résolution de grands défis de notre époque, qu’il s’agisse de la menace terroriste, de la prévention de la confrontation entre civilisations ou du développement durable. C’est ma première ambition, que d’être capable avec vous de préserver cette capacité de présence, d’intervention et d’action de la France sur ces grands enjeux comme face aux situations d’urgence.
J’ai aussi la certitude – non seulement parce que j’ai été commissaire européen pendant cinq ans, mais aussi parce que c’est une très ancienne conviction pour moi – que le destin de la France et celui de l’Europe vont ensemble. Il ne s’agit pas de les opposer. Le choix n’est pas entre la France et l’Europe, il est davantage entre une Europe européenne indépendante et une Europe sous influence. En ce qui me concerne, j’ai fait le choix depuis très longtemps de me battre pour une Europe européenne dans laquelle la France continue à tenir sa place et son rôle et, probablement parce que c’est le cas depuis les années cinquante, une place qui doit être au premier rang. Le projet européen est à la fois le plus beau projet politique, à l’échelle du continent, et le gage essentiel du progrès de la stabilité et de la paix. Mais c’est aussi un projet fragile, en raison du nombre de défis externes ou internes qu’il doit relever simultanément. Notre pays doit contribuer, au-delà de l’Europe, à définir un nouvel ordre international - plutôt que de subir l’existence d’une seule grande super-puissance entourée d’un désordre général -, à créer un ordre multipolaire, une nouvelle organisation du monde, comme l’avait dit avec beaucoup de force Dominique de Villepin aux Nations Unies, fondés sur le respect du droit, de la justice, de la solidarité, et sur le dialogue entre grands pôles régionaux, parmi lesquels naturellement le pôle européen.
Voici donc les trois grandes lignes de fond que j’aurai, avec l’équipe de mon Cabinet et les ministres délégués, le secrétaire d’État, mais aussi avec chacune et chacun d’entre vous, l’ambition de conduire : la diplomatie de l’urgence, le renforcement de la place et du rôle de la France dans le projet européen, et l’influence française dans le monde, en nous appuyant sur ce qui est un atout, je vais y revenir, la qualité, la diversité, le professionnalisme de notre outil diplomatique, de notre réseau consulaire, de notre réseau culturel, sans oublier les alliances françaises et les deux millions de Français qui vivent à l’étranger. Si vous souhaitez évoquer cette actualité de l’action extérieure de la France, les principes que je viens d’évoquer, la manière dont nous appliquons ces principes, notamment dans les trois grandes crises dont nous devons sortir : celle du Proche-Orient, celle de l’Irak et, en Afrique, la plus sensible, celle de la Côte d’Ivoire, je suis prêt, bien sûr, à répondre aux questions de citoyens que vous voudrez bien me poser.
J’ai évoqué une autre de nos priorités en faveur de l’influence française : l’outil diplomatique, que j’ai la chance et l’honneur d’animer. La recherche de la cohérence et de l’efficacité constitue l’objectif fondamental de la stratégie ministérielle de réforme. Cet objectif s’inscrit lui-même dans le cadre de la réforme de l’État. Il doit être poursuivi conjointement avec les autres services de l’État présents à l'étranger. C'est l'objet même de la mission que le Premier ministre vient de confier à Raymond François Le Bris.
Je voudrais maintenant évoquer les principaux thèmes qui nous réunissent aujourd’hui. Je limiterai mon propos mais je souhaite être assez précis.
En premier lieu, puisque c’est un souci, d’abord pour moi, le contexte budgétaire : le Président de la République - vous en avez été informés lors du dernier CTP du 31 mars dernier - a marqué, le 10 mars, sa préoccupation quant à l'évolution des crédits affectés à notre diplomatie. Et pour dire la vérité, cette lettre a été signée avant que je sois nommé ministre. M. de Villepin y est pour beaucoup, et il n’est pas très étonnant que le Président de la République ait marqué cette préoccupation. Il l’a fait de manière assez inhabituelle et solennelle, par une lettre qu’il a signée lui-même, au moment où débutait la procédure budgétaire, en tant que responsable suprême de l’action extérieure de la France. Il exprimait une préoccupation assez légitime, sur la cohérence entre l’ambition, l’allure, les grandes orientations de cette action extérieure qu’il conduit, et les moyens qui doivent être mis en synergie avec cette action extérieure, et sa politique.
Il a donc souhaité, dans une lettre adressée au Premier ministre, que le Gouvernement adopte dans ce domaine, comme dans d’autres domaines, une démarche nouvelle qui prenne mieux en compte les exigences de l'action internationale de la France. Dans cette lettre, le Président nous assigne quatre orientations :
- L'effort de rationalisation du réseau extérieur de l'État. Il s'agit bien sûr de la mission confiée à M. Le Bris, que j'ai évoquée. Et pour ce qui nous concerne immédiatement, c'est surtout l'affirmation du principe de recyclage sur nos priorités des économies que nous pouvons réaliser.
- Le deuxième axe, et il est important, est celui de l'exonération de tous gels ou annulations de crédits en 2004 : nous bénéficierons donc de tous les crédits votés par le Parlement en notre faveur.
- Troisièmement, la reconnaissance d'une priorité dans le budget 2005, qui se prépare, pour opérer des mesures de rattrapage, notamment sur nos crédits d'intervention et nos investissements immobiliers.
- Enfin, la définition d'un contrat, écrit-il, « pluriannuel de rigueur et de prévisibilité ». C’est un contrat d’objectifs et de moyens, qui permet de garantir sur plusieurs années - 2005, 2006, 2007 -, nos ressources.
Cette lettre est une marque de confiance du Président de la République envers notre administration. Elle réaffirme le rôle qui est le nôtre, d’une grande administration régalienne. Mais je pense, Mesdames et Messieurs, que cette confiance nous oblige, en raison du contexte de très grande rigueur qui frappe les finances de l'Etat. Je ne comprends pas cette lettre, je ne veux pas la comprendre, comme un prétexte pour figer ou conforter d’improbables positions préservées. Il s’agit tout au contraire, en bénéficiant des garanties dont nous avions besoin, de poursuivre, avec ténacité et imagination, tout en en conservant le bénéfice, l’effort de modernisation, d’adaptation, de rationalisation, qui a déjà été entrepris. Voilà ce que je peux dire pour le cadre budgétaire dans lequel nous allons pouvoir nous inscrire.
Je voudrais dire maintenant quelques mots de la LOLF. L’effort de modernisation entrepris a ceci de particulier que, engagé sous le régime du droit budgétaire précédant, ou ancien, celui de 1959, il se prolonge dans le cadre de la loi organique, dont plusieurs parlementaires que je connais bien, Didier Migot, ou il y a quelques années, Alain Lambert, ont été les artisans. Ces parlementaires vont continuer à s’intéresser, pour notre administration, à la mise en œuvre des conditions de cette loi organique, dans laquelle les notions d’enveloppes ou de crédits limitatifs prendront, vous le savez, une signification nouvelle.
Ce sont deux « missions » budgétaires que je serai appelé à défendre et à mettre en œuvre avec vous, sous réserve des toutes récentes observations des parlementaires que j’ai citées, et des observations qui viennent d’être adressées au Gouvernement et que nous examinons avec mes collaborateurs.
- En premier lieu, la mission interministérielle de l’aide publique au développement, constituée de deux programmes, celui de la Direction du Trésor et celui qui est piloté par le Directeur général de la Coopération Internationale et du Développement. Notre
ministère sera, vous pouvez en être assurés, "chef de file" de cette première mission
interministérielle de l’aide au développement.
- La deuxième mission est celle de l’action extérieure de l'Etat. C’est l’objet essentiel de ce contrat 2005-2007 que nous devons passer avec le
ministère des Finances et qui se compose, jusqu'à nouvel ordre, de trois programmes : « action de la France en Europe et dans le monde », « rayonnement culturel et scientifique », et enfin le programme «Français à l’étranger et étrangers en France ».
L’architecture telle que je viens de la décrire rapidement, et que vous connaissiez, correspond assez bien aux missions et aux métiers du ministère. Mais notre travail ne s'arrête pas là : il faut à présent définir les objectifs de chacun de ces programmes et les indicateurs qui y sont associés. Il va nous falloir également fixer de nouveaux modes de gestion : sans doute une autonomie large sera accordée aux chefs de programme, mais, Mesdames et Messieurs, il est essentiel pour moi que soient préservées les règles de base qui assurent la qualité du service public, tout particulièrement en matière de ressources humaines : je veux parler du statut de la Fonction Publique qui doit être respecté et le principe, majeur dans notre ministère, de la mobilité géographique et professionnelle des agents qui ne sera pas remise en cause par le cloisonnement des programmes. Je sais que c’est l’une de vos préoccupations, je la trouve légitime ; nous avons ainsi un cadre et une obligation législative.
Et c’est, Mesdames et Messieurs, à l’intérieur de ce cadre et de ces obligations que s’inscrit l’avenir - c’est mon deuxième point s’agissant du ministère - de la Stratégie ministérielle de Réforme, présentée au Premier ministre par mon prédécesseur, et qui figure désormais régulièrement à l’ordre du jour de vos CTP. Cette SMR est en quelque sorte une feuille de route pour la réforme du ministère. Je n’ai pas de problème pour la faire mienne, car j'ai clairement l'ambition d'une cohérence et d'une efficacité renforcées pour l’action extérieure de notre pays. Cette exigence, d’ailleurs, n’engage pas seulement le ministère des Affaires étrangères, mais également tous les services qui contribuent à l’action extérieure.
Pour ce qui nous concerne plus directement, un certain nombre de chantiers avancent : l’évolution des modes de direction et d’animation du ministère avec la mise en place d’une direction collégiale ; la formation, qui est une priorité importante, elle l’était avant que j’arrive et le restera, et dont les crédits vont doubler en l’espace de trois ans. D’autres chantiers ont été ou seront engagés. J’ajoute que la stratégie n’est pas, permettez-moi d’insister sur ce point de méthode, en elle-même un document figé, décisionnel et fermé. C’est un ensemble d’orientations fondamentales, adaptables à l’évolution du contexte et dont la mise en œuvre donnera lieu à des consultations régulières des instances paritaires.
Voilà pour les principes. Je voudrais maintenant évoquer quelques points particuliers, peut-être de manière préalable par rapport à vos propres interrogations ou à vos propres revendications.
Premier point particulier, celui de l’aménagement du réseau, qui est à l’ordre du jour de notre réunion. J'ai personnellement demandé que vous en soyez informés dans le détail, comme c’était le souhait de vos organisations. Cet aménagement de nos réseaux diplomatiques, consulaires, culturels, de coopération, constitue, je le sais, votre principal sujet de préoccupation ; ce souci pour moi est légitime, puisqu’il s’agit de décisions qui touchent les missions du ministère et les carrières des agents.
Ce plan est élaboré, monsieur le Secrétaire général, depuis plus d’un an et il répond à deux impératifs : d’une part, l’impératif naturel de l’adaptation d’un outil performant qui doit, pour le rester, être constamment en phase avec nos priorités et avec naturellement les évolutions de la scène internationale ; et notamment les nouvelles dimensions de cette scène internationale, je pense à l’ensemble européen, à l’européanisation croissante de nos politiques en général, à ces grands pôles que j’évoquais dans le monde, à la francophonie aussi. D’autre part, et c’est le deuxième impératif, celui du financement de nos priorités en matière de modernisation : formation, sécurité de nos implantations, systèmes de communication, projets immobiliers.
Le plan d’aménagement du réseau est le fruit d’un important travail de réflexion entre les directions concernées aux seules administrations centrales et les postes, sous l’impulsion et l’animation du Secrétaire général. Les chefs de poste ont fait des propositions, souvent courageuses et innovantes, pour adapter les moyens dans leur pays de résidence ; ces propositions ont été examinées par les directions géographiques et fonctionnelles concernées ; les arbitrages du Secrétaire général puis ceux du cabinet ont été rendus.
Je voudrais insister sur trois points :
Avant de détailler et de commenter les chiffres et les économies générées par ces mesures – qui ont vocation à être recyclées à notre profit – il convient d’examiner leur fondement et l’esprit de réforme qui les a guidées. Ainsi, l’aménagement des réseaux consulaires et culturels en Europe tire les conséquences des progrès de l’intégration européenne, des nouveaux enjeux, des nouvelles attentes des Français de l’étranger et des résidents des pays membres. La politique de rationalisation des compétences entre Instituts culturels et Alliances françaises ne favorise pas non plus les uns aux dépens des autres mais choisit le dispositif le plus adapté à l’action que nous voulons mener.
De même, les droits des agents ont été et continueront à être respectés : respect des temps normaux de séjour, pas de cessation anticipée de contrat, respect du droit local… J'inviterai les chefs de poste à être attentifs aux contraintes personnelles de tous les agents concernés par ces restructurations. Et s'agissant des agents de recrutement local, je demanderai que l'on explore toutes les possibilités de reclassement, dans notre réseau ou à l'extérieur. Cet aménagement du réseau est enfin, Mesdames et Messieurs, indissociable de la rationalisation de l’ensemble des réseaux d’action extérieure qui viendra le compléter.
Cette question des réseaux m'amène maintenant à évoquer les métiers consulaires. Aujourd’hui, les postes consulaires français sont organisés selon un modèle unique. Or, les attentes et les besoins de nos communautés ne sont pas les mêmes partout. L’un des axes de la modernisation consulaire passe par une meilleure répartition des tâches au sein d’un même pays ou d’une même zone géographique. L’expérience menée en Belgique ou celle des pôles régionaux de fabrication des passeports montre que des regroupements de compétences permettent de répondre à ces contraintes.
De même, nous devons absolument faire davantage appel aux nouvelles technologies. Le décret du 31 décembre 2003 sur l’inscription au registre des Français établis hors de France est le socle sur lequel doit être bâtie la nouvelle informatique consulaire. Nous devons nous aussi passer à l’ère de l’administration électronique et à la télé-administration. Ce saut technologique apportera une réponse moderne aux attentes de nos compatriotes et nous permettra de mieux nous adapter aux réalités d’aujourd’hui. Bientôt, la Commission nationale de l’Informatique et des Libertés sera saisie du projet "RACINE" ou "réseau d’administration consulaire informatisé". RACINE permettra de constituer une base mondiale des Français établis hors de France et d’un réseau consulaire mondial. Je suis, Mesdames et Messieurs, personnellement heureux de ces innovations que je vais suivre avec intérêt, et je voudrais en féliciter les responsables et les promoteurs. Je veillerai à ce que tous les agents qui en seront chargés y soient convenablement préparés.
J’allais évoquer le réseau consulaire, et bien naturellement, beaucoup d’entre vous le représente, le réseau culturel. Il s’agit d’une spécificité française, je pense même que c’est une chance pour la France que d’avoir à l’échelle du monde un tel réseau de coopération qui fonctionne en symbiose avec nos postes diplomatiques. Cette composante essentielle de notre diplomatie, aujourd’hui peut-être davantage qu’hier, implique d’être présent sur le front des idées et des arts, de la création culturelle ; elle nous impose de véhiculer, de partager nos valeurs dans une relation de dialogue et de respect de l’autre, ce qui fonde tout partenariat véritable.
Je rencontrerai personnellement les animateurs et les acteurs de réseau culturel, à l’occasion de la réunion du réseau qui se tiendra vraisemblablement mi-juillet. Les femmes et les hommes qui composent ce réseau et que je vais rencontrer, doivent pouvoir refléter avec professionnalisme la diversité de la société française. Ce réseau a donc besoin d’ouverture. Je souhaite que davantage de diplomates puissent, au cours de leur carrière, faire une expérience ou une étape à la DGCID, ou dans des postes culturels, pour que cette dimension soit encore plus intégrée dans la culture même de notre administration.
Il est nécessaire, me semble t-il, de diversifier les recrutements, en provenance du monde associatif, du monde universitaire ou des collectivités territoriales, de travailler sur une meilleure adéquation des profils avec les postes à pourvoir et d’organiser une diffusion plus large des postes offerts. Chaque agent doit avoir une lettre de mission définissant clairement ce que l’on attend de lui : c’est, me semble t-il aussi, la condition d’une évaluation objective. Dans ce réseau culturel, le professionnalisme est essentiel : à ce titre, la formation aux métiers culturels et de coopération doit être renforcée en matière de gestion mais aussi dans l’acquisition des mécanismes européens et des problématiques de l’aide publique au développement.
Le réseau culturel et de coopération, ce sont aussi des structures. Notre dispositif doit être en permanence adapté pour répondre aux exigences d’un monde en très grande et en très rapide mutation. C'est cela que traduit le schéma d’aménagement que je viens de rappeler. Les mesures engagées visant à supprimer les doublons ou à regrouper les fonctions là où sinon il faudrait sans doute amener le pavillon français, ces mesures vont, je le crois, dans le bon sens. Cette modernisation de notre dispositif doit s’inscrire dans une vision stratégique adossée à une analyse de nos priorités géographiques et politiques, à la prise en compte de nos intérêts économiques et à une réflexion sur les domaines où nous souhaitons être présents et sur les vecteurs que nous souhaitons privilégier.
Voilà les propos que je voulais vous tenir, Mesdames et Messieurs, sur cette adaptation de nos réseaux. C’est un exercice qu’il convient de conduire avec pragmatisme, avec un certain courage, avec une certaine ténacité, dans le cadre du dialogue avec les postes, les agents et nos partenaires. Mais, si j’ai demandé que l’on vous transmette ces orientations dans le détail, c’est aussi parce que j’attends de votre part des remarques et des suggestions, peut-être des critiques que nous examinerons, que j’examinerai avec objectivité et, si cela est nécessaire, dont je tiendrai compte.
Mesdames et Messieurs, la question des indemnités de résidence a été un grave sujet de préoccupation, et même de conflit.
Le Président de la République lui-même a souligné dans sa lettre au Premier ministre que les indemnités de résidence constituaient, je le cite, "une juste compensation des indéniables contraintes de l'expatriation". Ce rappel était nécessaire, comme l'est aussi la poursuite des réformes proposées en 2003 par les Inspections des Affaires étrangères et des Finances. La réforme – le volet social de la rénovation du système des indemnités de résidence – est conduite, je le pense, dans la transparence et doit l’être dans le dialogue.
Je souhaite que les discussions en cours, aussi bien avec les représentants du personnel qu'avec le ministère des Finances, pour améliorer les règles touchant aux congés maladie, aux voyages de retour intermédiaires et aux majorations familiales, puissent aboutir avant la fin de cette année. Et je vais personnellement m’y attacher. La phase suivante de la réforme sera celle de la "fonctionnarisation" des indemnités de résidence. Ce terme recouvre un objectif lui aussi indispensable, celui de la rémunération des fonctions et des responsabilités effectivement exercées, quels que soient les corps, les grades ou les statuts des agents en poste. Voilà le contexte dans lequel nous engageons les prochains exercices de gestion du ministère, dans un environnement plus prévisible et, je l’espère, je le pense, j’y travaillerai, dans un environnement apaisé.
Je voudrais terminer cet exposé en vous disant quelques mots de la modernisation de notre gestion des ressources humaines. Cette modernisation passe par la meilleure allocation des ressources, par une organisation plus rationnelle de nos corps de titulaires, par l'encouragement à la mobilité, par des échanges accrus et équilibrés avec d’autres partenaires ministériels, par une connaissance plus précise de nos besoins en terme de métiers.
Assurer des échanges plus nombreux et plus équilibrés avec d’autres administrations doit être une priorité. Les démarches entreprises auprès des principaux partenaires pour augmenter les échanges, et notamment le niveau des postes proposés à nos agents, ont commencé à porter leurs fruits. Je citerai notamment les échanges avec le ministère de l’Économie et des Finances. L’acquisition d’expériences à l’extérieur du ministère, pas seulement pour les conseillers des Affaires étrangères, est un élément, je le crois, important de notre modernisation. La réforme de la mobilité statutaire des conseillers des Affaires étrangères devrait se concrétiser dans les prochaines semaines. Pour accompagner ce mouvement, nous devons apporter aux conseillers un déroulement de carrière comparable à celui de leurs collègues administrateurs civils : je vais m’employer, là encore, à traduire cela concrètement. La réflexion sur les métiers nous amène également à constater parfois un décalage entre les missions réelles et les spécialités des agents. Je sais bien qu’aucune option de restructuration des corps de catégorie C ne fait l’objet, à ce stade, d’un consensus parmi les organisations syndicales. Il est toutefois, me semble t-il, difficile d’échapper à une réflexion globale sur l’amélioration des carrières des agents de catégorie C.
Je l’ai dit, Mesdames et Messieurs, plusieurs fois, la culture de l’évaluation, que j’ai beaucoup pratiquée à Bruxelles pendant cinq ans avec mes services dans ce poste, doit être renforcée au sein du ministère. Partout aujourd’hui, l’évaluation est un enjeu de la modernisation. L’évaluation implique un contrat clair entre l’encadrement et les collaborateurs sur des objectifs précis ; elle doit faciliter la compréhension par chacun de sa contribution aux missions de notre ministère ; elle doit concerner l’ensemble des personnels, y compris au plus haut niveau. Vous avez souligné, Mesdames et Messieurs, lors des discussions relatives à la stratégie ministérielle de réforme, le besoin d’une évaluation des responsables, sous-directeurs, chefs de service, directeurs et ambassadeurs, selon la formule dite "à 360 degrés". J’ai décidé de confier ce dossier, auquel j’attache de l’importance, à l’un des conseillers diplomatiques du Gouvernement, M. Gérard Cros, en liaison avec la Direction des Ressources humaines. Cela doit aller dans le sens d’une meilleure évaluation de l’encadrement supérieur du ministère. Dans un premier temps, l’expérience sera menée avec un certain nombre de sous-directeurs, directeurs et ambassadeurs volontaires. Mais cette démarche a vocation à s’étendre ultérieurement à l’ensemble des responsables.
Voilà - je voudrais maintenant conclure cet exposé - ce que sont l’esprit, la méthode, la raison aussi, au-delà des textes, de notre rencontre, et vous dire quelques mots du dialogue social. Ce sera le dernier axe de réflexion, non le moindre à mes yeux pour notre débat.
Je voudrais, Mesdames et Messieurs, vous dire ma conviction, assez ancienne, qu’une administration moderne et efficace a besoin d’interlocuteurs syndicaux professionnels, représentatifs et respectés. C'est l’intérêt des agents. J’ai dit « assez ancienne ». Bien sûr, depuis quatre semaines, j’ai la chance d’animer l’une des plus grandes, l’une des plus belles des administrations françaises. Mais j’ai aussi l’expérience, plus modeste, si je puis dire, auparavant à Bruxelles, de la fonction publique européenne. Celle aussi d’un autre ministère que j’ai réformé, dans le dialogue social, le ministère de l’Environnement en 1993. Enfin, ce qui n’est pas négligeable et c’est une expérience qui a compté pour moi, à la tête d’une administration territoriale, j’ai exprimé comme je le fais devant vous aujourd’hui, au tout début, les mêmes intentions et le même état d’esprit. Je crois qu’il est possible d’avoir la preuve que j’ai agi, en ces circonstances, en conformité avec l’état d’esprit initial et les engagements préalables. J’ai l’intention, avec le temps dont nous disposons, en tous cas dans les trois années à venir, d’apporter ici avec vous la même preuve, de faire la même démonstration.
Nous pouvons aussi, puisque je parle du dialogue social dans un ministère singulier, où la moitié des agents ne sont pas ensemble ici à Paris mais ailleurs, et parfois très loin, tirer un meilleur parti des technologies de l’information et de la communication pour renforcer ce dialogue social. Ces développements doivent être bien sûr concertés et maîtrisés, en préservant l’essentiel, c’est-à-dire les principes de représentativité et de responsabilité.
Les institutions actuelles du dialogue social doivent-elles évoluer ? Je ne veux pas prendre position, à ce stade, sur la réalité d’aujourd’hui qui est celle de deux comités techniques paritaires. Je vous écouterai, si vous souhaitez me dire des choses à ce sujet, objectivement. La problématique du dialogue social ne se réduit pas à ce seul élément d’ailleurs. Nous devons aussi travailler sur l'efficacité des instances de concertation au niveau local. Mais je crois qu'une réflexion d'ensemble sur nos formes de dialogue est nécessaire, compte tenu notamment des discussions en cours entre le ministère de la Fonction publique et de la Réforme de l’État, et les confédérations syndicales.
Je pense également qu’un dialogue social transparent et efficace doit s’intégrer dans un calendrier pluriannuel, afin de donner à tous, à vous et à moi, davantage de visibilité, davantage de prévisibilité. Il convient de distinguer, je le crois, ce qui relève de la négociation, dans le cadre institutionnel des CTP qui en sont le lieu naturel, de la concertation plus informelle, - j’en ai dit un mot tout à l’heure -, mais à certains égards plus productive et qui doit être plus fréquente, plus souple, et, enfin de l’information, qui est pour moi d’une égale importance. C’est d’ailleurs le vœu, si j’ai bien compris, que la plupart de vos organisations ont émis lors des entretiens bilatéraux que le Directeur général de l’Administration a eus avec vous au début de cette année. Et pour ce qui concerne le ministre des Affaires étrangères, soyez assurés que je vais prendre ma part, que je prendrai le temps de prendre ma part, dans chacune de ces dimensions de notre dialogue : négociation, concertation, information.
Naturellement, tout ce que je viens de dire, Mesdames et Messieurs, dont les mots ont été pesés, s’inscrit dans la continuité de décisions, de réformes législatives et réglementaires qui ne datent pas de moi, qui ont été mises en œuvre par Dominique de Villepin depuis deux ans, et même auparavant. Ce sont là des tendances de fond, des lignes de force dans lesquelles je dois m’inscrire, car il est normal que l’action de l’État s’inscrive dans la durée. Mais après vous avoir écouté aujourd’hui et dans les semaines qui viennent, collectivement comme à titre bilatéral, soyez assurés que je m’attacherai à prendre la mesure des choses, des enjeux et des marges de manœuvre, et que je ferai en sorte de m’appuyer sur les conseils, ainsi que sur mes propres convictions. J’ai bien l’intention, dans le cadre de ce que l’on appelle en patois savoyard le « main stream », de marquer un certain nombre d’inflexions ou d’orientations. Je n’exclus pas de mettre ma marque, j’en ai même l’intention, et de provoquer un certain nombre de réorientations, d’inflexions ou de modernisations supplémentaires.
Mais je veux prendre le temps de comprendre, de connaître, de mesurer. Voilà. Et la première étape pour comprendre, apprendre et mesurer, c’est maintenant, Mesdames et Messieurs, de vous écouter. Je vous remercie pour votre attention.