JOURNÉES DE LA COOPÉRATION INTERNATIONALE ET DU DÉVELOPPEMENT

(Paris (Palais des Congrès - Porte Maillot), 19-20 juillet 2005)

Conformément à la suggestion du SGEN-CFDT, un des ateliers des journées du réseau a été consacré aux questions de ressources humaines. Il en ressort clairement que pour l'Administration, la reconnaissance de l'importance de la dimension de la coopération internationale et des relations culturelles et scientifiques passe par une banalisation et l'insertion dans un moule unificateur.

La sous-direction des personnels culturels et de coopération va être supprimée et dans la nouvelle organisation de la DRH, les agents des secteurs culturels et de coopération (y compris les assistants techniques qui restent...) seront traités par les mêmes services que les agents diplomatiques et consulaires. De même, la durée des missions devrait être raccourcie, avec un contrat de 2 ans qui peut être prorogé pour une année (et le cas échéant encore une année supplémentaire) ; bref la durée normale des missions sera désormais de 3 ans prolongeables (2 + 1 [+ 1]) et non plus 4 ans prolongeables (2 + 2 [+ 1]).

La DRIC a renouvelé sa promesse de faciliter le retour des détachés de l'Éducation nationale...


Les discours officiels des ministres :


JOURNÉES DE LA COOPÉRATION INTERNATIONALE ET DU DÉVELOPPEMENT
ALLOCUTION DE LA MINISTRE DÉLÉGUÉE A LA COOPÉRATION, AU DÉVELOPPEMENT ET A LA FRANCOPHONIE,
MME BRIGITTE GIRARDIN

Monsieur le Directeur général,

Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,

Mesdames, Messieurs,

Je suis heureuse d'ouvrir devant vous ces Journées annuelles de la coopération internationale française. Pour vous, il s'agit désormais d'un rendez-vous régulier au cours duquel vous avez pour habitude d'échanger sur ce qui fait l'actualité de notre politique de coopération. Pour moi, mais aussi pour mes collègues Philippe Douste-Blazy et Catherine Colonna, il s'agit en revanche d'une première depuis nos prises de fonction à la tête de nos ministères. Je me réjouis donc de cette prise de contact avec vous, et plus encore de l'occasion qui m'est ainsi donnée de vous faire part de mes premières orientations dans les différents domaines d'attributions qui viennent de m'être confiés.

Le ministre des Affaires étrangères, Philippe Douste-Blazy, vous rejoindra demain. Il vous indiquera comment les domaines de l'aide au développement et de la diplomatie culturelle et scientifique s'intègrent à notre politique extérieure.

Je céderai dans un moment la parole à Catherine Colonna qui vous livrera son approche européenne des questions de coopération. Puis nous ouvrirons un débat que je souhaite le plus ouvert possible, en commençant précisément par les questions européennes, pour permettre à Catherine Colonna de nous quitter vers 10h15.

Voyez dans cette implication personnelle de vos trois ministres de tutelle, et au-delà dans la participation à vos travaux de Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la Culture et de la Communication, et de François Goulard, ministre délégué à l'Enseignement supérieur et à la Recherche, la volonté collective de ce gouvernement de vous témoigner de son estime, mais aussi de vous exprimer certaines attentes.

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En guise de préambule, je souhaite pour ma part vous dire l'honneur que je ressens à avoir reçu du président de la République et du Premier ministre la mission de piloter notre politique de coopération, de développement et de francophonie. Je connais la valeur des agents qui sont chargés de la mettre en œuvre : vous en êtes l'âme, et si j'attends de vous que vous vous adaptiez aux défis d'un monde multipolaire, vous pouvez aussi compter sur moi pour vous soutenir.

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Aujourd'hui, je souhaite mettre en avant deux priorités, et vous délivrer trois messages à caractère plus opérationnels.

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Pour ce qui est d'abord des priorités, je veux évoquer devant vous deux dimensions essentielles de notre action : le développement, d'une part, et la promotion de la langue et des valeurs françaises, d'autre part.

L'aide au développement, vous le savez, est une priorité du président de la République. C'est l'un des grands défis de notre temps, et si ce sujet est aujourd'hui au cœur de l'actualité, entre le récent G8 de Gleneagles et le prochain sommet des chefs d'État en septembre à New York, il nécessite malgré tout une mobilisation quotidienne de chacun de nous.

Ceux d'entre vous qui sont affectés dans des pays développés ou émergents pourraient en effet être tentés de considérer qu'il s'agit d'un sujet secondaire. Je voudrais donc leur dire qu'il n'en est rien. Nous comptons bien au contraire sur l'action diplomatique de tous, pour convaincre nos partenaires de la pertinence de la vision française du développement, étroitement intégrée à l'action culturelle.

Car la promotion de la langue et des valeurs françaises constitue une autre de mes priorités, notamment parce qu'il nous faut expliquer au contribuable français pourquoi il doit consacrer plus de deux milliards d'euros par an à nos actions :

L'espace de la francophonie peut nous y aider. Il réunit des peuples très différents par leur niveau de développement ou leur religion, et il constitue un des espaces privilégiés dans lesquels le dialogue des cultures, mais aussi le dialogue Nord-Sud, peuvent être approfondis. Nous devons donc consolider cet espace de solidarité.

Mais, en parallèle, nous devons rester attentifs à d'autres espaces dans lesquels se jouera pour la France la question de son influence dans les prochaines décennies : je pense à l'Union européenne ainsi qu'aux grands pays émergents comme la Chine ou le Brésil, qui sont appelés à jouer un rôle grandissant dans la vie internationale ; je pense aussi au Moyen-Orient, dont la position au cœur des tensions internationales rend indispensable un dialogue culturel approfondi.

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Dans ce contexte, je souhaite vous délivrer trois messages.

Le premier de ces messages est que les objectifs qui sont assignés à la coopération internationale sont clairs – je serais même tentée de dire enfin clairs. Ce sont des objectifs ambitieux, qui doivent tous nous mobiliser.

En matière de développement, notre feuille de route a été clairement établie par le chef de l'État. Il s'agit d'adhérer au consensus international que constituent depuis 2000 les Objectifs du Millénaire pour le développement. C'est le seul moyen de progresser par un effort collectif de tous les pays, du Nord comme du Sud. Je compte sur vous pour que ces objectifs de résultat soient bien intégrés à votre action quotidienne sur le terrain.

Cette adhésion aux Objectifs du Millénaire impose de répondre à la demande que nous adressent les pays du Sud d'augmenter l'aide française. Vous le savez, nous nous sommes résolument engagés dans cette voie. La France demeure ainsi le plus généreux donateur du G7. Elle a en outre décidé d'augmenter le volume de son aide publique au développement et de la porter à 0,5 % de son revenu national brut en 2007, et 0,7 % en 2012.

Je sais que beaucoup d'entre vous ont le sentiment que cette augmentation de notre aide ne s'est pas suffisamment traduite dans nos actions bilatérales, et je reconnais bien volontiers que depuis quelques années la majeure partie de nos efforts budgétaires a été orientée vers des actions multilatérales, qu'il s'agisse du Fonds mondial contre le sida, la tuberculose et le paludisme, ou du Fonds européen de développement. Sachez donc que j'entends me battre pour redonner à notre action bilatérale les moyens qu'elle mérite, et ce en dépit de contraintes budgétaires fortes, dont je mesure pleinement l'impact grandissant sur nos marges de manœuvre.

En matière d'échanges culturels et scientifiques internationaux, les grands objectifs à la réalisation desquels nous devons ensemble concourir sont aussi clairement définis :

- il s'agit de renforcer l'attractivité de notre territoire pour les chercheurs et les étudiants ;

- de promouvoir, en nous appuyant sur nos grands opérateurs audiovisuels, la place de notre pays dans le paysage audiovisuel mondial ;

- d'appuyer le rayonnement de notre langue ;

- de soutenir la diffusion de nos produits culturels ;

- mais aussi de faire adopter une convention internationale sur la diversité culturelle.

Sur tous ces sujets, je sais pouvoir compter sur le potentiel formidable que représentent la Direction générale de la Coopération internationale et du Développement (DGCID) et son réseau à l'étranger.

Le deuxième message que je souhaite vous adresser est que notre réseau de coopération et d'action culturelle constitue pour le gouvernement un instrument précieux pour promouvoir à l'étranger les intérêts et les valeurs de notre pays.

Les sujets sur lesquels vous travaillez sont en effet placés au premier rang des préoccupations de la communauté internationale, au premier rang également de l'actualité.

La solidarité internationale, en particulier avec l'Afrique, se trouve ainsi au cœur de l'agenda des institutions multilatérales, pour lesquelles l'année 2005 est l'"année du développement".

Les idées françaises, plus que jamais, créent l'initiative et alimentent les débats. Je l'ai constaté moi-même aux Nations unies fin juin, et vous avez tous pu le relever au cours du sommet de Gleneagles : partout, les idées françaises sont au cœur des discussions. Nous avons, dans ces domaines, un rôle d'impulsion vis-à-vis du reste de la communauté internationale, et je voudrais isoler trois sujets pour illustrer cet allant de la politique française de coopération :

- d'abord la priorité donnée à l'Afrique, seul continent qui n'atteindra pas les Objectifs du Millénaire en 2015 selon les tendances actuelles : depuis plusieurs années déjà, notre pays milite en ce sens, il nous faut donc nous réjouir de voir le Royaume-Uni nous rejoindre dans ce combat, en en faisant l'une des deux priorités de sa présidence du G8 ;

- ensuite, la recherche de financements innovants pour le développement : nous souhaitons ainsi que soit instaurée avant la fin de l'année une contribution de solidarité internationale sur les billets d'avion. Sur ce sujet également, le partenariat franco-britannique a joué à plein, et l'idée fait son chemin, ralliant progressivement à elle un nombre croissant de pays, issus de tous les continents ;

- enfin, la promotion d'une gestion ordonnée de la mondialisation : c'est dans ce cadre que s'inscrit la proposition française de création d'une Organisation des Nations unies pour l'Environnement ; or, cette proposition est désormais celle des 25 pays de l'Union européenne, et je sais qu'elle sera efficacement soutenue par le pays qui vient de prendre la présidence de l'Union.

En matière culturelle, il nous appartient également de défendre notre vision du monde. Ainsi, grâce à l'action de la France et de ses partenaires, notamment les pays de la Francophonie, le thème de la diversité culturelle est désormais très présent sur la scène internationale. Il trouve un large écho auprès d'opinions publiques inquiètes des risques d'uniformisation et de standardisation, résultats d'une mondialisation qui serait mal maîtrisée.

Reste à donner à cette notion de diversité culturelle un contenu concret, et des outils adéquats pour sa mise en œuvre. C'est ce à quoi je souhaite que nous nous employions : la convention sur la diversité culturelle est une première réponse opérationnelle. Les négociations commerciales qui reprendront en décembre à Hong Kong en constituent un autre élément important. Nous espérons tous que l'UNESCO adoptera à l'automne la convention qui est en cours de négociation, et dans une forme qui garantisse son insertion dans l'ordre juridique international.

Enfin, mon troisième et dernier message est celui de l'exigence croissante d'efficacité qui s'impose à nous. Pour cela, il nous faut continuer à nous moderniser.

Le 1er janvier prochain, vous le savez, la Loi organique relative aux Lois de Finances (LOLF), entrera en vigueur. Ce sera pour notre ministère une évolution importante. Nous devrons en effet passer d'une logique de moyens à une logique de résultats. Chaque dépense devra pouvoir se justifier au premier euro, et des objectifs de résultat nous seront, vous seront fixés, qui seront mesurés par des indicateurs quantifiés. Le contrôle de gestion et l'évaluation seront donc primordiaux, et le pilotage politique retrouvera toute sa primauté sur la simple gestion administrative.

Dans ce cadre, nous devrons renforcer la cohérence de notre dispositif institutionnel en matière de coopération et de développement.

S'agissant de l'aide au développement, il importe de mener à bien la réforme décidée par le Comité interministériel pour la Coopération internationale et du Développement (CICID) de juillet 2004. Le ministre chargé de la coopération est désormais le chef de file interministériel sur ces questions, tandis que les rôles des divers acteurs publics ont été clarifiés. Notre ministère doit donc renforcer sa fonction de pilotage stratégique, et sa capacité à exercer sa tutelle sur les opérateurs. En contrepartie, il transfère à l'Agence française de Développement (AFD) la mise en œuvre sur le terrain de notre coopération dans les sept secteurs prioritaires identifiés pour atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement. Il appartient en conséquence aux chefs des services de Coopération et d'Action culturelle (SCAC) de veiller personnellement à ce que cette réforme soit mise en place résolument. Ceci suppose de se mettre en ordre de bataille pour assurer le pilotage stratégique, et j'insiste au passage sur l'importance que j'attache aux documents-cadres de partenariat : il doit s'agir pour vous d'un véritable outil de pilotage et de programmation, en veillant à ne pas maintenir de doublon entre les actions de notre réseau et celles de l'AFD. Je sais que vous travaillez tous pour que cette réforme se passe au mieux. Je vous en remercie. Ce qui est en jeu, ne l'oublions pas, c'est la cohérence et donc l'efficacité de l'action extérieure de la France.

En matière d'action culturelle, les mêmes contraintes issues de la LOLF vont s'appliquer. Bien entendu, les mêmes causes ne produisent pas toujours les mêmes effets, mais la question de la cohérence de notre dispositif doit être, je le pense, examinée de façon encore plus attentive, et je serais très heureuse de recevoir vos suggestions en ce domaine.

Il nous faut en particulier adapter la carte et la configuration du réseau des services de coopération et d'établissements culturels à l'étranger. Ce réseau doit évoluer en fonction des missions qui lui sont confiées, des priorités géographiques comme des priorités sectorielles de la politique étrangère française. Ainsi, de même que les SCAC de la Zone de solidarité prioritaire (ZSP) doivent être reconfigurés pour tenir compte de l'évolution des relations entre le ministère et l'AFD, le réseau culturel doit s'étendre dans les pays à fort enjeu pour la France - j'ai à l'esprit les ouvertures de centres en Chine – mais aussi dans les pays avec lesquels nous normalisons nos relations (Afghanistan, Algérie...) ; à l'inverse, il doit pouvoir être réduit, de manière maîtrisée, là où les échanges culturels avec notre pays sont denses et spontanés, là où par conséquent l'accompagnement par l'État est moins prioritaire. Mais que l'on ne se méprenne pas sur le sens de mon message : il ne saurait être question de baisser la garde, sous prétexte d'aménager notre réseau ; c'est au contraire parce que nous avons une grande ambition pour ce réseau, que nous devons le faire évoluer. Il s'agit bien d'améliorer notre force de frappe, pour mieux la préserver.

Pour cela, nos interventions doivent aussi mieux s'intégrer au cadre d'action de l'Union européenne et des organisations multilatérales. Pour être efficaces et légitimes, nous ne devons pas agir seuls, mais avec d'autres, notamment dans le cadre de la politique européenne de solidarité internationale. Dans vos pays de résidence, vous devez veiller à articuler très en amont votre action avec celles de la Commission européenne et de nos partenaires. Vous devez avoir le réflexe européen, le réflexe multilatéral. La DGCID a élaboré des plans d'actions pour renforcer la dimension européenne de la coopération internationale française. Ils seront présentés au cours de ces Journées. Je souhaite qu'ils soient rapidement mis en œuvre.

Il vous faut aussi profiter davantage des Technologies de l'Information et de la Communication. Par exemple, vous pouvez vous procurer très rapidement un film français auprès de l'administration centrale par Internet (film pour lequel bien entendu les droits auront été acquittés). Vous pouvez créer, toujours sur Internet, un portail sur le débat d'idées en France.

***

Pour conclure, je souhaite vous renouveler toute mon attention personnelle : je mesure parfaitement l'importance et la difficulté de vos missions. Soyez certains que je serai à l'écoute de vos préoccupations, de vos interrogations. Je pense bien sûr à vos conditions de travail et de séjour dans un certain nombre de pays. Je pense aussi aux moyens qui sont alloués à vos actions et qu'il faut défendre dans les arbitrages budgétaires. Je pense enfin aux méthodes de travail et aux procédures, parfois nouvelles, auxquelles vous avez à vous adapter.

Sur tous les aspects évoqués devant vous aujourd'hui, j'attends de vous des résultats, que cela soit clairement établi entre nous. Sachez en retour que vous pouvez compter sur moi pour soutenir vos actions, et pour faire valoir au sein du gouvernement l'utilité et la formidable valeur ajoutée qu'apporte notre réseau de coopération et d'action culturelle à nos relations extérieures.

Je vous remercie./.


JOURNÉES DE LA COOPÉRATION INTERNATIONALE ET DU DÉVELOPPEMENT
ALLOCUTION DE LA MINISTRE DÉLÉGUÉE AUX AFFAIRES EUROPÉENNES,  MME CATHERINE COLONNA

Madame la Ministre, Chère Brigitte,

Monsieur le Ministre,

Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,

Monsieur le Directeur général, Cher Philippe,

Mesdames, Messieurs, Chers Collègues,

Je suis heureuse de retrouver les membres de notre réseau culturel et de coopération dont je connais le dévouement et la compétence. Je suis venue aujourd'hui vous parler d'Europe et de la dimension européenne de votre action.

Quelques mots d'abord sur la situation de l'Union européenne car j'imagine que vous devez être nombreux à vous demander où nous en sommes aujourd'hui. Je ne vous surprendrai pas en vous disant que la période actuelle est difficile. L'avenir de la Constitution européenne reste incertain, même si désormais une majorité d'États l'a ratifiée ; le budget européen n'a pu être décidé pour la période 2007-2013, faute d'accord entre les États membres lors du Conseil européen du mois dernier.

Cela étant, notre pays entend garder toutes ses convictions, comme l'ont rappelé à plusieurs reprises le président de la République et le Premier ministre. D'une part, nous savons que l'histoire de l'Europe est faite de crises surmontées : il nous faudra refaire la preuve de l'Europe auprès de nos concitoyens et surmonter les difficultés actuelles. D'autre part, nous savons aussi que l'Europe continue d'avancer. Je pense à ITER, à Galileo ou à Airbus. Ces exemples montrent que nous sommes plus forts quand nous sommes unis et savons travailler ensemble.

Dans ce contexte européen d'incertitude institutionnelle, la priorité doit être donnée à l'Europe des projets. C'est ainsi que nous montrerons à nos partenaires européens et à nos concitoyens que l'ambition européenne de la France reste entière.

Votre action au sein du réseau revêt dans ce contexte une importance décisive. Tout en continuant à promouvoir l'image de notre pays, vous devez porter, encore plus que par le passé, cette ambition européenne de la France dans le domaine de la coopération internationale et du développement.

En Europe, un effort particulier doit être fait en direction des nouveaux États membres. Hors d'Europe, notre souci doit être de mieux coordonner nos actions avec nos partenaires et avec la Commission. Tout en préservant l'identité de notre action bilatérale, sachons affirmer la présence de l'Europe sur la scène internationale, où elle est utile et attendue. L'action de l'Europe est particulièrement visible dans les pays ACP grâce au Fonds européen de développement. Mais il faut aussi renforcer notre présence en Méditerranée en consolidant le processus de Barcelone dont nous commémorons cette année le Xème anniversaire. N'oublions pas non plus les grands ensembles émergents, en Amérique latine ou en Asie, qui souhaitent nouer avec l'Union européenne des partenariats plus étroits.

Dans ce cadre, je souhaite insister sur trois priorités d'action :

Tout d'abord notre influence sur la politique européenne de développement doit être renforcée.

L'Europe est l'acteur majeur de l'aide au développement dans le monde, avec plus de la moitié de l'Aide publique au développement. La contribution française au titre de l'aide communautaire s'établit pour sa part à 20 % et nous devons continuer à donner l'exemple en accroissant l'efficacité de notre action.

Cela passe par une meilleure coordination avec les mécanismes européens et, sur place, avec les délégations de la Commission. Cette coordination est d'autant plus importante que le rôle de ces dernières n'a cessé de croître. En effet, la réforme de l'aide communautaire engagée depuis 2000, qui a notamment visé à déconcentrer les compétences, a renforcé le rôle joué par les délégations de la Commission au niveau local. Ainsi préparent-elles, avec le pays bénéficiaire, les documents de programmation de l'aide communautaire qui sont ensuite approuvés à Bruxelles ; elles identifient les projets puis les mettent en œuvre. Or nous savons tous que l'efficacité de l'aide est une exigence permanente : nous devons faire davantage d'efforts en ce sens.

Ces éléments doivent vous inciter à développer sur place des relations avec vos collègues de la Commission en vue d'orienter, le plus en amont possible, les stratégies qui se mettent en place. Je sais que certains postes travaillent en étroite concertation avec la Commission et exercent une réelle influence sur les projets communautaires. D'autres doivent encore intensifier leur action en la matière.

Certains diront sans doute qu'il est parfois difficile de développer ces relations de proximité avec les délégations de la Commission du fait d'une information qui circule mal ou d'un climat de confiance réciproque insuffisant. Il reste qu'il nous faut être un acteur majeur du développement sur le plan européen et que vous êtes par définition les mieux placés pour orienter sur place les actions de la Commission.

N'hésitez donc pas à nouer des liens étroits avec les directeurs des opérations des délégations, qui sont souvent les interlocuteurs les plus utiles sur les questions de coopération et de développement. N'hésitez pas non plus à vous appuyer sur nos compatriotes qui travaillent auprès des délégations ou des gouvernements des pays bénéficiaires. Ils constituent des relais précieux.

En résumé, je dirais que vous pouvez agir dans trois directions : en inspirant l'action de l'Union à la lumière de notre expérience ; en vous appuyant sur les experts français au sein des équipes européennes ; en développant des synergies entre l'action de l'Union et celle de notre pays partout où c'est possible.

La deuxième priorité doit viser à favoriser davantage l'Europe de la culture. La France est porteuse d'une vaste ambition pour l'Europe en la matière. Depuis plusieurs années, elle œuvre en faveur de la diversité culturelle et encore aujourd'hui dans le cadre des négociations à l'UNESCO. La France est également à l'origine du projet de bibliothèque numérique européenne qui devra assurer la diffusion de notre culture dans le monde entier.

Notre réseau culturel doit donc se mobiliser pour intégrer davantage la dimension européenne dans son action.

En Europe, la réflexion en cours sur la reconfiguration de nos établissements culturels a permis de dégager des missions prioritaires. Deux d'entre elles me paraissent capitales :

- tout d'abord, la promotion de la langue française. Ceci suppose le maintien et l'élargissement du plan d'action pour le français, langue de l'Union européenne, et le développement, en particulier par les établissements culturels, du français de spécialité cours pour fonctionnaires, cours pour étudiants en partance pour la France, français des affaires, etc. ;

- ensuite la promotion de la création contemporaine française et le soutien des industries culturelles françaises. Cette action, dont je connais l'importance en raison notamment de mes responsabilités récentes au CNC, doit s'inscrire pleinement dans notre stratégie d'influence. Notre action sera d'autant plus efficace qu'elle jouera la carte du partenariat avec les autres réseaux européens, par exemple en soutenant des programmes communs ou en incitant les établissements culturels à partager des bâtiments, voire en encourageant nos partenaires à développer leurs propres dispositifs d'aide à la création, comme nous le faisons dans le domaine cinématographique.

Inspirons-nous aussi de la coopération entre les réseaux d'établissements culturels français et allemands, qui connaît un réel succès. Cette coopération s'est traduite par la mise en place d'un fonds pour les programmes culturels en pays tiers, d'échanges de personnels culturels et de colocalisations d'établissements culturels français et allemands à l'étranger.

Hors d'Europe, l'organisation de manifestations culturelles à dimension européenne doit être encouragée ainsi que la création de centres culturels européens.

Enfin, il faut renforcer la politique européenne en matière d'enseignement supérieur et de recherche. L'accueil des étudiants et des chercheurs étrangers constitue l'une des composantes de notre politique d'attractivité du territoire. Dans un environnement international très concurrentiel, nous devons nous appuyer sur l'Europe.

Il faut ainsi travailler à la constitution d'un espace européen de l'enseignement supérieur, en encourageant notamment les coopérations réelles entre les établissements supérieurs français et leurs homologues européens, en particulier ceux qui, impliqués dans le cadre d'Erasmus, sont attractifs à l'échelle européenne. Cet espace permettra aussi de favoriser une plus grande mobilité des étudiants et des enseignants.

N'oublions pas non plus les programmes communautaires destinés aux pays tiers, dont l'objet est de favoriser la mobilité des étudiants et des chercheurs. Je pense aux programmes Tempus et Erasmus Mundus, ou bien encore aux programmes Alfa, Alban et Asia Link. Ces programmes doivent mobiliser davantage l'ensemble des canaux de la coopération française - ministère des Affaires étrangères, ministère de l'Education nationale, EduFrance, Agence Léonardo Socrates de Bordeaux… Notre action en la matière reste encore trop exclusivement nationale. Il nous appartient de l'européaniser.

La construction d'un espace européen de la recherche doit également renforcer la compétitivité de l'Union européenne. Il s'agit d'un des piliers du processus de Lisbonne, qui est destiné à faire de l'Europe l'économie fondée sur la connaissance la plus dynamique et la plus compétitive au monde d'ici 2010.

La réussite d'ITER nous a montré dans ce domaine que nous avons tout intérêt à agir en commun. Sachons donc coordonner davantage nos politiques nationales de recherche. Le développement de réseaux, qui permettent l'accès aux programmes européens, revêt ainsi une importance capitale.

Comme le Premier ministre l'a indiqué, il est essentiel que notre pays puisse attirer les chercheurs du monde entier. Nos postes diplomatiques doivent donc assurer la promotion de la mobilité des chercheurs. Là encore, une action concertée avec les délégations de la Commission doit être encouragée.

Vous l'aurez compris, nous devons, plus que jamais, affirmer l'identité européenne de notre coopération internationale. A l'heure où l'Europe est en crise, il est impératif de "penser européen". Cela suppose, j'en suis consciente, une certaine révolution des esprits mais il nous faut persévérer dans cette voie. Soyez convaincus qu'en intégrant dans votre action la dimension européenne, en affirmant la présence de l'Europe dans le monde entier, vous contribuez également à préserver et à renforcer l'image de notre pays sur la scène internationale./.


JOURNÉES DE LA COOPÉRATION INTERNATIONALE ET DU DÉVELOPPEMENT
ALLOCUTION DU MINISTRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION,
M. RENAUD DONNEDIEU DE VABRES

Mesdames, Messieurs,

Chers Amis,

J'ai eu l'occasion de rencontrer nombre d'entre vous lors de mes déplacements et lors des Rencontres pour l'Europe de la culture. Je me félicite que les journées du réseau nous permettent de nous retrouver et de réfléchir ensemble au sens de votre action.

Car vous êtes au cœur de l'action extérieure de l'État. La culture est au cœur d'une stratégie politique destinée à répondre à la crise d'identité à laquelle ni la France ni l'Europe n'échappent aujourd'hui et qui explique pour une grande part les soubresauts du monde.

C'est une conviction personnelle à laquelle je suis profondément attaché : je crois que l'un des défis essentiels des responsables politiques aujourd'hui est de donner à nos concitoyens la mesure de la force que représente une identité solide, pour affronter la mondialisation et s'ouvrir à l'autre sans craindre de se renier soi-même.

Je crois qu'avec la mondialisation, le rôle de la diplomatie culturelle se renouvelle entièrement. Il n'est plus seulement de se mettre au service des artistes, des créateurs, des professionnels de la culture et de l'audiovisuel. Il ne se limite pas davantage à servir notre influence nationale, ce qui reste évidemment essentiel. Mais il est de faire vivre et de faire ressortir la force des identités, d'une façon pacifique et respectueuse de l'autre, dans un monde dans lequel la plupart des conflits sont d'abord des conflits d'identité.

L'idée de la diversité culturelle, vous le savez, s'est développée sur le modèle de la diversité biologique, sur le fondement d'une même aspiration à une meilleure maîtrise de la mondialisation, dans la diversité des identités.

Dans cette perspective, l'expression "faire vivre la diversité culturelle" résume assez fidèlement l'ambition qui doit être la nôtre aujourd'hui. C'est une question identitaire pour les personnes comme pour les civilisations : comment être soi parmi les autres ? C'est une question économique très concrète : comment répondre à la massification des industries culturelles et préserver les moyens de créer et de diffuser une culture originale dans un monde de libre-échange ? C'est aussi une question diplomatique : comment se donner les instruments juridiques nécessaires dans le cadre des Nations unies et comment faire en sorte que l'Europe se donne une volonté politique au service de la culture ?

Qu'on la considère comme une chance extraordinaire à saisir pour la circulation des idées, des personnes, des œuvres et des produits, ou bien comme une menace sur nos emplois, sur notre modèle social et nos modes de vie, la mondialisation est un fait acquis. La seule question qui vaille est : que faire dans un monde global ?

Aussi permettez-moi de m'arrêter un instant sur les changements qu'introduit la mondialisation dans la vie culturelle et dans la formation des identités. Pour ma part, j'en retiens deux :

- tout d'abord, l'extraordinaire développement du tourisme international qui représente 700 millions de personnes aujourd'hui et qui a doublé en dix ans. La circulation des personnes à cette échelle est un fait historique sans précédent qui modifie la perception que les opinions publiques ont les unes des autres et le mode d'accès à la culture de l'autre.

Il s'agit pour la France d'un exceptionnel moyen de se faire connaître et de se faire aimer puisqu'elle est la première destination touristique dans le monde avec 75 millions de touristes en 2003, une recette de 30,7 milliards d'euros et un effectif de 5 % des salariés de notre pays.

Lorsque l'on sait que la culture est une motivation déclarée pour la moitié des touristes qui visitent notre pays, on mesure l'importance de la culture pour l'attractivité de la France et son rayonnement international.

- deuxième phénomène, qui est plus préoccupant, le mouvement d'uniformisation de la culture. C'est un vrai risque.

- Pour le cinéma et l'audiovisuel, d'après l'UNESCO en l'an 2000, 85 % des films diffusés en salle dans le monde, étaient produits dans les studios d'Hollywood ; 50 % des fictions diffusées à la télévision en Europe étaient d'origine américaine, cette proportion atteignant jusqu'à 67 % en Italie.

En 2003, alors que les films américains représentaient 45 % des entrées en salles en France et 71 % dans l'Union européenne, la part des films européens n'était que de 3,3 % des entrées aux États-Unis. A l'évidence, la relation culturelle transatlantique est déséquilibrée.

- Dans le domaine de la musique, en 2003, cinq sociétés se partageaient 75 % des parts du marché mondial de l'édition de disques (Universal Music, EMI, Sony music, Warner et BMG). Actuellement elles ne sont plus que quatre, et leur nombre pourrait même se réduire à trois si EMI et Warner fusionnent.

- Dans le domaine du livre, enfin, même si la production littéraire française se porte bien puisque, en 2004, 6000 titres français ont été traduits, parmi les dix romanciers les plus traduits au monde, neuf étaient des écrivains de langue anglaise.

Si ces chiffres concernent largement les industries culturelles, ne nous y trompons pas, c'est l'ensemble des activités de création culturelle qui est en jeu. Comme le montrent avec précision les études conduites par mon ministère sur les publics, c'est d'abord par la consommation des produits des industries culturelles, souvent chez soi, que s'effectue l'accès à la culture, et de moins en moins, par les formes plus traditionnelles, que sont les sorties dans les musées, les expositions, les lieux de spectacle vivant, ou encore les visites du patrimoine architectural et monumental. Comment imaginer que la consommation de biens culturels normalisés ne soit pas sans influence sur les capacités de création musicale, théâtrale, littéraire, ou dans le domaine des arts plastiques de demain ?

C'est d'ailleurs ce constat de nouveaux modes d'accès à la culture, par la toile et par les réseaux électroniques, qui a conduit le président de la République à vouloir le projet de Bibliothèque numérique européenne en concertation avec l'Allemagne, l'Espagne, la Hongrie, l'Italie et la Pologne, dont j'ai installé le comité de pilotage la semaine dernière.

Tel est le contexte qui place la culture au cœur de notre stratégie politique aujourd'hui. Je souhaite suivre dans cette perspective trois lignes d'action : l'emploi, l'Europe et l'identité, pour lesquelles je souhaite pouvoir compter sur la richesse et la vitalité de votre réseau, sur votre appui, avec l'accord et le concours de Philippe Douste-Blazy, de Brigitte Girardin et de Catherine Colonna.

L'emploi culturel

En application des priorités déterminées par le Premier ministre, il appartient à l'État de veiller avec la plus grande attention à contribuer à la création et au maintien de l'emploi culturel.

C'est un aspect qui n'est pas assez pris en considération dans notre action. L'activité culturelle crée de l'emploi et de la richesse.

En France, 439 000 emplois relèvent directement du secteur culturel. Les industries culturelles représentent à elles seules plus de la moitié de ces emplois.

Dans l'Europe à 25, on estime que 4,2 millions de personnes occupent un emploi culturel, soit 2,5 % de la population active, dont la moitié dans les industries culturelles.

Cela, à mes yeux, transforme de manière évidente le travail des attachés de coopération et d'action culturelle, qui doivent non seulement être de fins connaisseurs de la culture de leur pays de résidence, non seulement être des diplomates au service de notre influence, mais de plus en plus avoir l'esprit de conquête de nouveaux marchés.

Dans les déplacements que j'effectue à l'étranger, vous pouvez compter sur mon entière disponibilité à soutenir des activités qui concourent à la création et à la sauvegarde de l'emploi : par exemple, l'architecture en Chine, la présentation du patrimoine de nos territoires sur la Grande muraille, mais aussi la relocalisation des tournages (Midem, UniFrance film).

C'est déjà le cas dans nombre de nos postes, mais le décloisonnement entre missions économiques et missions de coopération est souhaitable. A l'international aussi, je suis le ministre de l'emploi culturel.

Garantir la préservation de notre économie de la culture, et plus généralement de l'emploi culturel, c'est aussi, alors qu'un nouveau cycle de négociation, dit de Doha, est en cours à l'OMC, s'opposer à toute nouvelle demande de libéralisation des services culturels et audiovisuels, et donc maintenir fermement la position qui a été celle de l'Union européenne depuis 1993, en indiquant clairement que les mesures de soutien financier et réglementaire, telles que les quotas, ne doivent pas être considérés comme des mesures protectionnistes, mais comme des mesures d'encouragement à la diversité des expressions culturelles.

L'Europe de la culture

La France a besoin de l'Europe pour faire vivre la diversité culturelle et l'Europe a besoin de la diversité culturelle pour continuer de se construire.

L'un des traits marquants de la civilisation européenne tout au long de l'histoire, c'est l'échange, l'ouverture, la curiosité du monde extérieur et la culture de l'altérité. C'est en s'ouvrant au reste du monde que la culture européenne prend conscience de son identité et de sa singularité.

Cela dit, il existe bien une identité européenne qu'exprime et que forme la culture, depuis des siècles. Elle est l'un des fondements du projet européen d'aujourd'hui.

Dans une Europe élargie qui se cherche une conscience commune, dans une Europe qui souffre des risques de la mondialisation, je suis en effet convaincu que la relance de l'Europe passe par la culture.

J'ai décidé dès mon arrivée de faire de l'ambition européenne l'une des priorités de mon ministère en lançant trois initiatives :

- un parlement permanent de la culture, c'était le sens des Rencontres pour l'Europe de la culture qui se sont tenues à la Comédie française les 2 et 3 mai et qui se poursuivront à Budapest à la mi-novembre et à Grenade fin avril. Comme l'a dit le président de la République à cette occasion, "le projet européen est par essence un projet culturel. Sans doute est-il même d'abord cela : la volonté d'un ensemble si divers de peuples et de nations de partager un même idéal de civilisation tout en restant fidèles à leurs identités respectives".

- une charte pour l'Europe de la culture, texte nécessaire dans le relatif silence des traités. 19 ministres de la Culture ont déjà rejoint la Déclaration adoptée à Paris les 2 et 3 mai. Mon objectif est de franchir une étape supplémentaire vers un texte juridiquement contraignant, en rebondissant sur l'adoption probable de la convention sur la diversité culturelle de l'UNESCO en octobre.

- l'Europe des projets culturels. A côté des réseaux européens qui existent déjà et qu'il convient de conforter, à côté des travaux du Conseil à Vingt-cinq, il est apparu nécessaire de lancer des initiatives concrètes entre quelques États membres qui entendent aller plus vite et plus loin, en relation étroite avec la Commission européenne. Je viens d'adopter des propositions en ce sens - label "patrimoine de l'Europe", aide au sur-titrage, nouveaux albums des architectes et des paysagistes, réseau de librairies européennes, mutualisation des moyens sur certains marchés pour les industries musicales. L'idée est de créer des solidarités concrètes qui amèneront la naissance de projets de plus en plus ambitieux.

La question des identités

Peu de pays au monde disposent d'un patrimoine et d'une vitalité créatrice comparables aux nôtres. Notre patrimoine, nos créations, sont un atout extraordinaire dans la mondialisation. Comme facteurs d'identité mais aussi comme facteurs d'attractivité.

Vous le savez, le premier contact avec la France, c'est souvent la découverte d'œuvres d'artistes français ou d'expression française. Ainsi, 60 % des spectateurs étrangers qui ont vu un film français éprouvent le désir de découvrir la France. Les œuvres sont le reflet de notre société, de nos valeurs, par exemple : "l'Ariana, un cinéma pour Kaboul".

Ce n'est pas seulement une question d'images. Les décisions d'investissement directs se font aussi en considération de l'environnement culturel d'un pays – avec ITER à Cadarache, le besoin de vie culturelle des cadres des grandes entreprises internationales.

La culture est également une carte de visite exceptionnelle pour les entreprises françaises à l'étranger car elle permet d'afficher une identité, une singularité, dans un monde de plus en plus standardisé.

Dans le contexte de trouble identitaire que j'évoquais, j'ai décidé de développer des actions de mise en valeur de notre patrimoine. Non pas des vieilles pierres, mais en résonance avec le monde contemporain – l'ouverture de Fontainebleau à la jeunesse, Chambord et "les visiteurs", le Quai Branly est en soi un exemple.

J'y attache la même importance dans notre rayonnement international et je vous demande de vous mobiliser pour faire connaître la vitalité de notre patrimoine – par exemple : des investissements de diffusion, comme le centre Pompidou à Hong Kong, le Louvre à Atlanta, mais aussi des opérations ponctuelles comme "l'incroyable pique-nique" sur la Grande muraille.

Il y a dans l'immédiat un enjeu pour lequel je vous demande de continuer de vous mobiliser avec la plus grande énergie : l'adoption de la convention sur la diversité culturelle lors de la Conférence générale de l'UNESCO qui s'ouvrira le 3 octobre à Paris.

Les trois réunions intergouvernementales d'experts entre décembre 2004 et juin 2005 ont abouti à l'adoption d'un texte relativement consensuel - seuls les États-Unis s'y sont opposés formellement -, cohérent et équilibré. Ce projet de "convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles" reconnaît la non-subordination de la convention aux traités internationaux existants et répond aux trois objectifs que la France s'était assignée : affirmer le droit souverain des États à mettre en œuvre des politiques culturelles, reconnaître la spécificité des biens et services culturels et renforcer la coopération et la solidarité en faveur des pays en développement.

Même si le projet qui a été adopté le 3 juin a fait l'objet d'un large consensus, la tentation pourrait exister de remettre en chantier ce texte avec l'objectif d'obtenir un accord unanime des États. Aussi devons-nous accentuer nos efforts, pour obtenir une adhésion déterminée des pays membres de l'UNESCO, afin que ce texte ne soit aucunement remis en question. Il faut continuer sans relâche à expliquer, à convaincre et rappeler l'importance pour chacun des pays où vous êtes en poste, de s'abstenir de prendre tout engagement de libéralisation dans les négociations commerciales qui limiterait l'application de la Convention de l'UNESCO.

Enfin, si le texte est bien adopté en octobre prochain, comme nous le souhaitons, sa ratification par le plus grand nombre d'États, dans des délais rapides, sera indispensable. Même si le nombre de ratifications nécessaire requis pour l'entrée en vigueur de la convention est relativement peu élevé –il a été fixé à 30- il ne faut pas sous-estimer la lenteur administrative des processus de ratification et garder en mémoire que le poids de la convention face aux autres accords internationaux sera d'autant plus important que la masse critique des pays adhérents sera élevée.

C'est donc bien dans une véritable "course contre la montre" que nous sommes engagés, avec le processus parallèle de signatures d'accords bilatéraux de libre-échange proposés à de nombreux pays par les États-Unis, comportant des clauses de libéralisation des offres de services culturels et audiovisuels, ainsi qu'avec le cycle de Doha en cours devant l'Organisation mondiale du Commerce. Aussi, votre appui sera-t-il tout aussi indispensable dans cette nouvelle phase que dans les précédentes.

Les Rencontres pour l'Europe de la culture ont permis de renforcer la conviction commune des États européens autour du combat pour la diversité culturelle ; le fait que, à l'UNESCO, l'Union européenne se soit exprimée d'une seule voix, a été un élément majeur et déterminant dans les avancées obtenues. Quelles que soient les vicissitudes du projet de traité constitutionnel européen, les débats qui ont eu lieu sur ce projet ont montré l'importance du maintien du principe de l'unanimité pour les négociations commerciales de biens et de services lorsque la diversité culturelle est en cause.

La convention de l'Unesco posera la première pierre d'un droit international de la culture, au même titre qu'ont commencé à se construire des droits internationaux de la santé et de l'environnement.

Au-delà, je vous invite à réfléchir à ce qui contribue à l'affirmation et au rayonnement de l'identité de la France dans le monde d'aujourd'hui.

- La langue est à l'évidence un fondement essentiel de l'identité. La diversité des cultures sera à l'honneur de mars à octobre 2006, lors du festival des cultures francophones. Ce festival, monté avec le soutien actif de l'AFAA, s'efforcera de montrer au grand public la modernité et la multiplicité du monde francophone.

- L'accueil et la formation des artistes et des professionnels de la culture étrangers est l'un des axes majeurs de l'action internationale du ministère de la Culture et de la Communication. Nos programmes permettent l'accueil de plus de 300 professionnels étrangers de tous les domaines de la culture : depuis l'année dernière, dans le cadre du programme "profession culture", les grands établissements publics qui relèvent de mon ministère, reçoivent des responsables culturels étrangers pour des stages d'immersion de longue durée.

La création de stages bilingues destinés aux conservateurs de musées, ou aux professionnels européens des industries culturelles, ou de soutien à la pratique du français avec le concours de l'Alliance française, doit permettre d'élargir le viviers des professionnels d'avenir dont la connaissance du français est limitée.

L'aide que vous apportez à la mise en œuvre et à la promotion de ces programmes, sous l'impulsion de la direction générale de la Coopération internationale et du Développement (DGCID), que je tiens à remercier, est essentielle.

- Je tiens aussi à vous dire combien il me tient à cœur que vous puissiez saisir toutes les occasions d'assurer la promotion de nos artistes et de leurs œuvres au-delà des limites des instituts culturels français, dans le cadre des initiatives locales qui se manifestent dans vos pays de résidence. Je pense par exemple au Maroc, dont le gouvernement, entend faire du soutien actif à de grands festivals populaires un moyen de lutte contre l'obscurantisme et l'intolérance. Le succès populaire considérable de ce type d'initiative mérite que la France s'y associe chaque fois qu'elle le peut, dans le souci permanent du dialogue des cultures. La diversité culturelle en action, c'est aussi cela. Je tiens enfin à redire toute l'importance que j'attache à vos efforts de promotion dans le monde entier des artistes qui travaillent en France et de leurs créations.

Avant d'échanger avec vous, je conclus sur la perspective de l'adoption de la convention sur la diversité culturelle en octobre prochain. Ce sera, si elle se concrétise, un très beau succès pour notre pays. Si nous y arrivons, nous aurons à cœur de considérer ce résultat de notre action commune, non pas comme un point d'arrivée, mais comme un nouveau départ pour orienter notre politique culturelle au service d'une mondialisation mieux maîtrisée et d'un monde plus apaisé et plus tolérant.

Je ne voudrais pas terminer sans vous féliciter et vous remercier pour les services que vous rendez à notre pays. Je sais la difficulté de votre travail sur le terrain : dans un contexte budgétaire par hypothèse toujours insatisfaisant, vous faites preuve au quotidien d'un engagement personnel, d'une inventivité tout à fait remarquables et je souhaite qu'à l'avenir il soit mieux tenu compte – au moment souvent délicat de votre retour en France – des compétences réelles que vous avez acquises dans l'exercice de vos fonctions à l'étranger.

C'est ainsi que moi-même, j'ai choisi pour diriger le Pôle Culture de mon cabinet un ancien de votre réseau, dont sont également issus trois de mes conseillers techniques.

Soyez donc rassurés : il y a une vie après les postes à l'étranger !

Je vous remercie./.


JOURNÉES DE LA COOPÉRATION INTERNATIONALE ET DU DÉVELOPPEMENT
ALLOCUTION DU MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,
M. PHILIPPE DOUSTE-BLAZY

Monsieur le Secrétaire général,

Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,

Monsieur le Directeur général,

Mesdames et Messieurs,

Permettez-moi de vous dire que j'ai beaucoup de plaisir à me trouver parmi vous aujourd'hui pour ce rendez-vous traditionnel, qui est aussi pour vous tous un moment de retrouvailles quasi-familiales, l'occasion de faire le point sur les missions et les expériences des uns et des autres, tout en donnant à l'avenir un nouveau souffle et de nouvelles perspectives.

J'ai déjà eu l'occasion, par le passé, en tant que ministre de la Culture et ministre de la Santé, de rencontrer les acteurs de la coopération que vous êtes, et je connais bien les atouts et les richesses de ce réseau que vous faites vivre au quotidien, partout dans le monde.

S'il y a une chose dont je suis convaincu après six semaines passées dans ce grand ministère, c'est qu'il n'y pas d'un côté un réseau diplomatique et consulaire, et de l'autre un dispositif de coopération et d'action culturelle : nous sommes tous au service d'une seule et même politique, et il n'y a aucune raison d'instaurer des différences - par exemple entre le travail consulaire et la coopération universitaire. Ce serait d'ailleurs un non-sens. L'une, de fait, n'existe pas sans l'autre.

Le réseau mondial que vous représentez ici aujourd'hui, ce sont 10 000 agents, 154 services de coopération, 153 établissements culturels, 283 alliances françaises conventionnées, 27 instituts de recherche en sciences sociales, 150 missions archéologiques, près de 2 000 assistants techniques. C'est là un atout unique pour notre diplomatie, et une force de mobilisation que peu de pays dans le monde peuvent se targuer d'égaler. Reste à s'assurer que ce dispositif est bien au service d'une politique étrangère moderne, efficace et lisible, et dont les Français puissent se dire fiers.

Ce défi, vous en êtes au demeurant bien conscients puisque vous vous attachez à le relever chaque jour. Au-delà de la diversité des missions des uns et des autres, il s'agit de renforcer la cohérence de notre réseau pour que son identité et ce qui fait sa singularité soient reconnaissables entre toutes. Il nous faut une signature simple, lisible de loin, et par tous. Nous devons pouvoir être reconnus pour ce que nous sommes : cela signifie que chaque partie du réseau, l'action de chacun d'entre vous, doit être comprise comme un élément à part entière de la politique de la France et de son influence dans le monde. Ce n'est pas là une petite ambition. Je dirais même que c'est une tâche difficile et qui nécessite beaucoup d'engagement. Mais j'y vois aussi pour nous tous une perspective exaltante, car elle consiste à joindre nos efforts et nos énergies, souvent dispersées ou isolées, pour créer le sentiment d'une œuvre collective, vraie et résolue. C'est là, en tout cas, un objectif auquel je vous invite tous à participer, car il en va de notre efficacité et de notre capacité à donner à notre action de coopération un nouvel élan, nécessaire pour ne pas dire indispensable.

En toile de fond de cette mobilisation à laquelle je vous convie, nous devons tous ensemble mesurer les bouleversements du monde qui nous entoure. Dans l'enchevêtrement des défis que nous devons affronter, je voudrais insister aujourd'hui sur trois d'entre eux qui sont au cœur de l'actualité : je veux parler de l'Union européenne, du terrorisme et du choc des cultures, et enfin, de l'aide au développement.

L'Europe traverse aujourd'hui une phase difficile de son histoire et dont l'issue sera sans nul doute décisive pour son avenir. Je lisais récemment le dernier discours de Gordon Brown, le Chancelier de l'Échiquier, à la City. C'est un discours qui a le respect des autres, qui a la chance d'être excessivement honnête. Il disait : "entre l'État-nation et la mondialisation, il n'y a pas de place pour une cellule intermédiaire, que l'on appelle l'Union européenne". Ce n'est pas ce qu'a dit Tony Blair au Parlement européen, ce n'est pas ce que dit le commissaire Peter Mandelson, mais c'est ce que dit Gordon Brown. Mais la question est là, il a raison de la poser comme cela. Ce n'est pas un problème de budget, ce n'est pas un problème d'équilibre financier, ce n'est pas un problème d'élargissement - bien que beaucoup de choses pourraient être dites là-dessus. Ce n'est pas un problème de Politique agricole commune, d'autant moins d'ailleurs que, pour tout ce qui est négocié au sein de l'Organisation mondiale du Commerce aujourd'hui, la question est de savoir qui aura le pouvoir vert : est-ce que ce seront les États-Unis d'Amérique ? Ou est-ce que ce sera l'Europe ? Les États-Unis d'Amérique oubliant d'ailleurs qu'il y a des pays en voie de développement pour lesquels la seule solution est d'entrer dans le commerce international. Le sujet n'est pas là, le sujet n'est pas de savoir s'il y aura des dépenses d'avenir ou des dépenses du passé. Cela relève de la communication.

Le vrai débat, il existe depuis le discours 1950 au salon de l'Horloge, près duquel vous vous vous trouverez tout à l'heure. Il existe depuis Jean Monnet et Robert Schuman. Il existe depuis la CED avec le "non" à l'union politique. Il est d'actualité parce que les Pays-Bas et la France ont dit "non" à la Constitution. Il existe parce que nos concitoyens ne nous suivent plus dans le programme européen, dans le projet européen que nous leur dessinons. C'est de notre faute bien sûr, ce n'est pas le peuple qui a tort par définition. Et la question est de savoir si, oui ou non, on veut une union politique européenne. Est-ce que nous considérons l'Europe, l'Union européenne comme un espace de libre échange, simplement comme un espace concurrentiel où se trouvera la meilleure concurrence ? Ou est-ce que nous estimons que l'Europe est une force politique comparable un jour aux États-Unis d'Amérique, à l'Inde, à la Chine, avec une armée, avec une politique étrangère commune, avec une politique de recherche intégrée, comme on a su le faire pour la Politique agricole commune ? C'est cela la question. Est-ce que c'est une Europe puissance ou pas ?

Et, sans remettre en cause l'objectif général de la construction européenne, nous percevons tous qu'il y a un besoin urgent de clarifier les buts que nous entendons poursuivre ainsi que la méthode et les moyens pour y parvenir. Ceci est d'autant plus vrai que les derniers élargissements ont pu contribuer à rendre le projet européen moins lisible. Je me suis permis, par exemple, de dire au dernier Conseil Affaires générales qu'il n'est pas question pour quelqu'un comme moi de voir arriver la Croatie par exemple, tant que Mme Carla Del Ponte continue à nous dire qu'il n'y a pas de coopération entre le gouvernement croate d'un côté et le Tribunal pénal international de l'autre, pour rechercher les criminels de guerre, à dix jours du dixième anniversaire de Srebrenica. Il n'est pas pensable que nous voulions faire nous, au Quai d'Orsay, l'Union européenne, si Mladic, Karadzic et Gotovina ne sont pas sous les verrous et si on n'est pas sûrs que tout est fait dans les gouvernements, qui veulent entrer, à juste titre, et ils seront les bienvenus, dans l'Union européenne, si on n'est pas sûrs que les gouvernements ne feront pas tout pour cela.

Face à ces doutes, à ces interrogations qui sont aussi, de la part des citoyens, une demande de sens et d'explication, les chefs d'État et de gouvernement ont décidé, avec raison, de lancer une réflexion commune sur l'avenir de l'Europe. Le président Chirac l'avait demandé dans la nuit de ce dernier Conseil européen, par ailleurs pathétique, avec des pays de l'Est qui venaient d'arriver et qui nous demandaient ce que nous faisions. Et Tony Blair a récemment prévu qu'en octobre 2005 il y aura ce grand sommet informel exceptionnel sur l'avenir de l'Europe. Le moment est venu de refonder en quelque sorte le pacte qui nous rassemble pour retrouver un nouvel élan. Cet effort de réflexion, nous devons le conduire au niveau national dans tous les domaines. Et le champ de la coopération ne doit pas être laissé à l'écart : il faut y mesurer les implications des révisions en cours, car, là comme ailleurs, les complémentarités entre les actions de l'Europe et nos propres programmes constituent un aspect important de nos activités. Vous-mêmes, chacun et chacune dans votre domaine, avez bien senti la nécessité d'adapter nos moyens aux évolutions du monde. Vous nous en faites part dans vos messages, dans vos demandes, et je m'attacherai à ce que ces attentes trouvent une réponse à leur juste mesure.

Ensuite, il y a le terrorisme avec les tragiques événements qui se sont produits à Londres le 7 juillet dernier et que nous avons tous bien évidemment en mémoire : je souhaite que nous réfléchissions ensemble à ce qu'ils impliquent à la fois en termes de sécurité de nos installations culturelles et en termes de relations au monde extérieur.

Pour le dire plus franchement : quelles sont les conséquences du terrorisme sur notre espace culturel et politique commun ?

Je crois cette question centrale car, derrière la violence terroriste, il n'y a pas seulement la volonté de tuer. Il n'y a pas, et j'en suis sûr, de Dieu qui expliquerait que l'on fasse sauter 32 enfants à Bagdad, il y a quelques jours. Et ce n'est pas un sujet religieux parce qu'il n'y a pas de Dieu qui puisse expliquer l'inhumanité, la terreur ou la haine, ce n'est pas vrai. Il y a, à l'inverse, une volonté de dresser de nouvelles forteresses entre les peuples afin de rendre inopérantes les valeurs de tolérance et de respect de l'autre que nous défendons depuis si longtemps partout dans le monde. Aussi, face à cette menace, il va sans dire que la première de nos réponses doit être la fidélité à nos principes et à notre action de coopération : plus que jamais, nous avons obligation de préserver la confiance en faisant prévaloir le dialogue entre les cultures et les valeurs d'écoute des autres civilisations. Il y avait cette phrase magnifique d'un de nos prédécesseurs à Renaud Donnedieu de Vabres, Jack Lang ou moi, qui s'appelait Jacques Duhamel, quand on lui posait la question : "Qu'est-ce qu'est la culture ?", il a eu cette phrase merveilleuse qui est arrivé comme cela de son cœur ou de son âme, il a dit : "La culture, c'est l'art de transformer une journée de travail en une journée de vie". La culture, c'est par définition une culture qui se frotte aux autres cultures car sinon il n'y a pas de culture, il y a une dictature. Les cultures, ce sont les autres, donc le respect des autres cultures et civilisations. Nous avons fait de la diversité culturelle l'un des piliers de notre action diplomatique. C'est cette diversité et ses vertus de dialogue qui se trouvent aujourd'hui prises pour cibles, et c'est par elles et pour elles que nous continuerons d'agir, en contribuant à diffuser ces valeurs humanistes qui sont au cœur de vos missions et surtout de la vocation de notre pays. Les terroristes font de la politique, ils ne font rien d'autre.

Enfin, l'aide au développement représente le troisième axe de notre réflexion, non seulement parce que la pauvreté représente toujours dans le monde un fléau inacceptable, mais parce qu'en apportant de meilleures réponses au désarroi des plus faibles et des plus démunis, nous préviendrons les crises et nous renforcerons de manière générale la sécurité.

On dit souvent que le terrorisme se nourrit de la pauvreté alors qu'en même temps Ben Laden est l'un des hommes les plus riches du monde et que certains pays d'où partent ces actions terroristes ou ces réseaux terroristes sont parfois les plus riches du monde. Mais en même temps il est évident, il serait fou de ne pas penser que l'humiliation des peuples est un terreau extraordinaire pour faire partir des milliers, des dizaines de milliers de jeunes dans cette aventure terroriste inhumaine.

J'ai été médecin pendant plusieurs années. Je suis souvent allé sur le terrain et j'ai eu l'honneur de servir mon pays comme ministre de la Santé, comme d'autres. Et nous sommes quelques-uns à nous intéresser depuis plus de quinze ans au sujet suivant : peut-on accepter longtemps, sans être complètement fous ou bêtes, que 4/5ème des pays du Sud n'ont pas de système de santé publique ? Comment peut-on accepter longtemps que cette maladie ou ces maladies, qui sont aujourd'hui la malaria mais surtout la tuberculose et le sida, qui sont des maladies que l'on connaît, que l'on sait aujourd'hui combattre, ne sont pas traitées dans ces pays ? On le dit, vous le savez mieux que personne vous ici, mais personne ne nous écoute depuis quinze ans. Je vois avec plaisir que le G8 a commencé à réfléchir au sujet. Le président Chirac, depuis plusieurs années, le G8 aujourd'hui, le président Chirac et le président Lula ont décidé de proposer de nouveaux financements innovants ; Tony Blair, avec courage, a su présenter ce sujet au G8. Mais je pense que le Fonds mondial contre le sida n'est pas aujourd'hui à la hauteur des enjeux. Et je pense que la dernière fois que l'on a connu cela, c'était pour la fièvre espagnole. La fièvre espagnole tuait des centaines de milliers de personnes dans différents continents. On ne savait pas ce que c'était, on n'avait pas les traitements. Aujourd'hui on sait ce que c'est, et nous avons les traitements. Ne nous étonnons pas s'il y a, à la sortie, des flux migratoires considérables qui ne font que commencer ou s'il y a un terrorisme grandissant. Nous avons donc une nécessité, celle d'accroître les moyens financiers au service du développement. C'est là une avancée essentielle, et c'est sur cette voie que nous devons poursuivre résolument notre action.

La France veut un monde plus juste. Elle ne se résout pas au "mal développement" qui fait que 1 milliard de personnes vivent avec moins d'un dollar par jour. Elle ne peut accepter un monde où 15 millions d'enfants meurent chaque année de maladies que nous savons pouvoir guérir et où plus de 8 000 personnes décèdent chaque jour du sida. Nous avons d'ailleurs doublé notre contribution au Fonds mondial pour le sida il y a quelques jours.

J'entends moi-même, au cours des prochains mois, engager de nouvelles mesures en faveur de la diffusion des médicaments génériques, qui sont un enjeu essentiel de l'aide au développement. Il faut bien comprendre qu'avec des médicaments moins chers, on soigne plus de malades. Recherchons, en liaison avec les laboratoires pharmaceutiques, les moyens de mettre rapidement à la disposition des populations concernées davantage de médicaments. Et qu'on ne me dise pas qu'en disant cela, je suis ministre de la Santé. Parce que je vois que M. Bush aujourd'hui, de manière totalement unilatérale, a demandé aux laboratoires pharmaceutiques de se trouver au rendez-vous essentiellement avec des pays d'Afrique subsaharienne, pour leur demander ce dont ils ont besoin. Je vois aujourd'hui que le président Lula est en train de créer des réseaux de génériques, que la Chine commence à créer des réseaux de génériques. Il n'y a aucune raison que la France, qui a été une fois de plus visionnaire avant les autres, ne le fasse pas.

Je souhaite également marquer l'importance de notre mobilisation en faveur de l'Afrique en me rendant, avant la fin du mois de juillet, au Darfour et dans l'Afrique du Sahel, pour soutenir les initiatives que nous menons sur place au bénéfice des populations déplacées et réfugiées comme de celles atteintes par la sécheresse.

Il faut en ce domaine faire preuve de persévérance et agir dans la durée. Et la France, plus que tout autre pays, doit clairement marquer que sa solidarité ne se manifeste pas par intermittence mais qu'elle est, au contraire, durable, sincère, rigoureuse et digne de confiance.

Voilà, Mesdames et Messieurs, trois axes parmi d'autres autour desquels je souhaite que nous orientions notre réflexion de politique étrangère dans les mois à venir. Ainsi s'établissent les principes directeurs de notre action : face au défi des inégalités économiques, il faut renforcer notre aide au développement ; face aux clivages culturels, il faut animer un dialogue des civilisations, soucieux tout à la fois de diversité culturelle et du respect des principes universels ; face au défi de la connaissance, il faut améliorer la place de notre pays dans la production et la diffusion du savoir.

Bien évidemment, pour mener à bien ces objectifs dans un monde en continuelle évolution, il nous revient d'agir en permanence pour adapter et améliorer les outils de notre action de coopération.

Brigitte Girardin vous a parlé, hier, de la réforme de nos instruments de l'aide publique au développement. Cette réforme était une nécessité, elle est maintenant en bonne voie ; je n'y reviens donc pas.

Je voudrais, en revanche, insister sur trois chantiers importants auxquels nous devrons consacrer une partie de nos efforts cette année.

Il y a d'abord la recherche et le lien à créer entre la recherche fondamentale et l'innovation industrielle. La science et la formation supérieure représentent un axe majeur de l'attractivité de notre pays. Nous devons consolider notre place dans le réseau de production et de diffusion du savoir à l'échelle internationale et, pour ce faire, la France doit être en mesure de conserver, et même d'améliorer, sa capacité à attirer les chercheurs et les étudiants.

Il en va de nos valeurs, car la science est l'un des creusets de l'universalisme contemporain et c'est autour du savoir que se forment des communautés susceptibles de travailler en vue d'un bien commun.

Il en va aussi de nos intérêts. La participation à l'économie de la connaissance constitue, plus que jamais, un facteur décisif du dynamisme et de l'influence d'un pays. Nous mesurons chaque jour davantage le lien qui existe entre croissance et investissement, entre recherche et développement. Enfin, reconnaissons-le : la recherche est la clé du différentiel grandissant entre l'Europe et les États-Unis, et nous ne devons pas nous y résoudre.

J'étais, il y a quelques jours, en contact avec l'administration américaine. J'ai profité de ces quelques jours là-bas pour rencontrer des responsables des "Think Tanks" américains. Tous me disent que le grand enjeu pour les Américains c'est l'agriculture et les Nouvelles technologies. Ils voient bien qu'à Détroit il y a de moins en moins d'ouvriers qui travaillent dans l'industrie automobile, ils voient même que les derniers "4x4" américains se font à moitié prix et presque mieux en Chine, cela commence ; ils voient des délocalisations arriver, y compris de leur industrie automobile. Mais ils ont foi dans deux choses : le pouvoir vert, les agriculteurs, l'autosuffisance agro-alimentaire, la sécurité alimentaire et les 90 milliards de dollars investis en 2005 dans les info-technologies. Ils ont déjà 95 % des moteurs de l'Internet, mais ils investissent 90 milliards dans les infos-technologies. Ils investissent près de 100 milliards dans les biotechnologies. Aujourd'hui, 7 % des médicaments sont fait par les biotechnologies, les bio-médicaments. Dans dix ans, 45 % des médicaments se feront par les biotechnologies. Dans vingt ans, 95 % des médicaments ne seront plus fabriqués par la chimie, mais par les biotechnologies, ainsi que tous les vaccins - 100 % des vaccins. Quelle sera l'influence de la diplomatie du pays ou du continent qui donnera, qui permettra, qui ouvrira le robinet des vaccins ou des médicaments faits par les biotechnologies ?

Au moment où l'Union européenne n'est pas capable de monter son Agence européenne de la recherche, au moment où on n'est pas capable de faire la politique intégrée de la recherche, celle qui compte pour nos petits-enfants, les Américains investissent, eux, 100 milliards de dollars dans les biotechnologies. Idem pour les nanotechnologies.

Alors, il faut œuvrer pour que nos équipes soient associées aux nouveaux instruments européens de la recherche en pays tiers, notamment en Chine, en Inde et en Amérique du Sud. Je compte sur vous pour porter ce discours très offensif auprès des pays qui n'ont pas encore, mais cela vient, les techniques de recherche disponibles.

Naturellement, dans ce domaine du savoir comme dans celui de la culture, nous devrons aussi agir pour que notre action nationale trouve un nouveau relais au niveau européen. Je souhaite que nous proposions des initiatives à nos partenaires pour renforcer l'intégration de la recherche au sein de l'Union européenne. Je pense en particulier au Conseil européen de la Recherche, qui a tous les atouts pour devenir cette agence européenne dont je parlais à l'instant. Nous devons aussi créer, comme le Premier ministre l'a souligné, des pôles d'excellence de classe mondiale pour la recherche et la technologie. Enfin, il nous faut poursuivre sur la voie de l'harmonisation des cursus en participant à la généralisation du dispositif LMD (licence – master – doctorat).

Le premier objectif étant Recherche-Formation, le deuxième sera, en matière de recherche, est tout aussi fondamental : il doit s'agir de faire de la France un espace de formation supérieure au premier plan en Europe et dans le monde. Notre pays peut devenir le premier pays d'accueil en Europe des étudiants étrangers. Pour ce faire, nous devons nous donner tous les atouts pour attirer les meilleurs étudiants des 2ème et 3ème cycles dans les domaines scientifique, technique, financier et de gestion. Merci et bravo, Monsieur le Secrétaire général, pour ce que vous avez fait depuis plusieurs années, pour faire en sorte que les étudiants étrangers qui arrivent en France soient des étudiants motivés.

Je souhaite à cet égard que le train de mesures adopté en 2005 soit mis en œuvre très rapidement. Je pense aux Centres pour les études en France, ces plates-formes de services qui ont vocation à être mises en place dans les pays où existe une forte demande. Je pense aux collèges doctoraux, je pense aux nouveaux programmes de bourses d'excellence. Je pense aussi et surtout à la nécessaire mobilisation des collectivités locales, des entreprises, des pôles universitaires et scientifiques régionaux au service de notre projection internationale. Pour cela, vous pourrez vous appuyer sur les pôles de compétitivité que vient de lancer le gouvernement. Pour la première fois, dans notre pays, depuis très longtemps, on n'a pas décidé de saupoudrer. On a décidé de "mettre nos billes" dans certains endroits et pas dans toutes les préfectures ou sous-préfectures.

Bien évidemment, tout cela ne pourra pas se faire si nous n'améliorons pas, dans les meilleurs délais, la qualité de l'accueil réservé aux étudiants étrangers. Certains d'entre eux, vous le savez sans doute, ont parfois abandonné pour cette raison leurs études dans notre pays. Nous ne faisons pas suffisamment pour les accueillir. J'ai demandé qu'une mission soit lancée pour examiner dans le détail cette situation et j'accorderai la plus grande attention à ses conclusions : c'est l'image de notre pays, mais aussi le succès de notre entreprise en matière de recherche, qui sont ici en jeu.

Voilà pour le domaine de la Recherche et de la Formation.

Il y a ensuite le domaine culturel où notre action extérieure doit être chaque jour animée par l'ambition. Ambition de porter plus haut encore la voix de la France. Il ne faut baisser les bras ni dans la défense de nos idées, ni dans nos efforts pour soutenir et promouvoir le plus largement possible la diffusion de la langue française. A cet égard, nous avons rendez-vous en 2006 pour le Festival francophone en France qui se tiendra, à l'initiative du président de la République, de mars à octobre prochain. Mobilisons-nous pour faire de ces rencontres un temps fort à l'honneur de nos arts et de nos artistes.

Mais, au-delà de ces manifestations, il nous faut agir dans le long terme.

Tout d'abord, nous devons maintenir nos efforts pour faire entrer la diversité culturelle dans le droit international. Un projet de convention existe, et nous saurons en octobre prochain s'il est adopté à l'UNESCO : cela serait pour notre pays une victoire importante, puisque se trouveraient enfin consacrés la spécificité des biens culturels et le droit des États à définir et à mener la politique culturelle. Je sais la part, Monsieur le Directeur Général, que la Direction générale de la Coopération internationale et du Développement (DGCID) et notre réseau ont pris dans cet effort collectif, et je vous en remercie très sincèrement, du fond du cœur.

Le combat pour le pluralisme culturel, nous devrons aussi le mener au niveau européen pour défendre les acquis obtenus il y a plus de quinze ans avec la directive "télévision sans frontière". En 1995, j'étais ministre de la Culture. Nous présidions le Conseil européen, lorsque la directive "télévisions sans frontières" revenait en vigueur après 1989. Nous avions gagné le combat ! On me dit qu'il y a un séminaire, en Grande-Bretagne, prochainement, sur l'avenir de la directive "télévision sans frontière". Nous voyons aujourd'hui que l'évolution technologique - et notamment l'apparition de nouveaux vecteurs - invite à une adaptation de notre dispositif réglementaire. Prenons garde à préserver ce qui a permis à notre production nationale et européenne en matière audiovisuelle de continuer à exister et même à se développer. Je vais réunir prochainement des acteurs culturels. Je réunirai des producteurs, des acteurs, des compositeurs. Je souhaite que vous soyez les vecteurs de ce combat français et européen. Le gouvernement entend être vigilant en ce domaine et j'inviterai, pour ma part, en septembre prochain, tous ces représentants de la profession à une réflexion commune à ce sujet afin que nous nous préparions au mieux pour cette conférence britannique organisée fin septembre à Liverpool sur l'audiovisuel européen. Dans le respect de l'indépendance de chacun, il importe que nous nous mobilisions ensemble pour faire vivre la production audiovisuelle européenne.

Il n'y a pas d'ailleurs que de la culture dans ce que je dis, il y a aussi de l'économie. N'oubliez pas que l'une des grandes révolutions de l'audiovisuel depuis dix ans, c'est que, dorénavant, il n'y a pas que l'hertzien, il y a le satellite, et qui dit satellite, dit satellite géostationnaire, c'est-à-dire des satellites qui restent au-dessus des continents et qui les arrosent de programmes.

Sur la planète, un enfant regarde en moyenne entre 3 heures et demie et 4 heures et demie la télévision par jour. Il y a aujourd'hui une évidence : les Américains sont les seuls à pouvoir s'offrir les satellites géostationnaires de télécommunication privés. Turner, Disney, Rupert Murdoch et je pourrais continuer. Il n'y a pas de réflexion politique en Europe à ce sujet. Je le dis d'autant plus simplement que je fais partie du personnel politique. Il n'y a pas de réflexion politique européenne ni même peut-être, pourquoi pas, entre pays latins, pour nous grouper financièrement, pour envoyer, nous aussi, des satellites géostationnaires. J'avais essayé avec Canal + à l'époque, en 1996. C'était peine perdue. TF1 n'écoute pas ce genre de chose. Il y a là probablement un véritable enjeu majeur, car si tous les programmes sont américains, cela signifie que pendant 3 heures et demie ou 4 heures et demie par jour, tous les enfants africains ou les enfants asiatiques, ou les autres, reçoivent des programmes américains. Et ce sont les fameuses anecdotes, que je vais vous raconter. D'abord celle du jeune délinquant de ma circonscription, à l'époque où j'étais dans les Hautes-Pyrénées, qui arrive devant le président du tribunal de Tarbes et qui lui dit "Votre Honneur" : il regardait en permanence des fictions américaines. Et puis encore, celle de l'un des plus grands patrons de l'industrie du luxe en France, et donc dans le monde, qui dans les années 1999 je crois ou 1998, constate qu'au Japon, brutalement, alors que le parfum "x" se vendait de manière extraordinaire, il y a eu une chute brutale ; en quelques semaines, il n'en vendait plus. Il demande à son directeur au Japon ce qui se passe. Le directeur fait une, deux, trois enquêtes. Rien ! On ne sait pas ! Même vendeur, même marketing, même publicité ! Une chose avait changé : la principale héroïne du principal feuilleton, vu par 75 % des ménagères de moins de 50 ans au Japon, à la télévision, qui prenait ce parfum, l'avait jeté pour un autre parfum ! Les conséquences économiques, aujourd'hui, des fictions américaines sont considérables. On profite des fictions, on profite de la production audiovisuelle pour faire passer des messages commerciaux et des messages économiques. La négociation que nous avons à mener en automne sur la directive "télévisions sans frontière" est majeure.

Nous devons aussi apporter un meilleur soutien aux pays qui éprouvent des difficultés à faire connaître leur culture. Il nous faut continuer, à travers le Fonds Sud ou le Fonds Image Afrique, à aider les pays en développement à produire et à diffuser leurs propres images de cinéma et de télévision. Ainsi, "Afrique en création" doit poursuivre son remarquable travail en faveur de la création artistique africaine dans les domaines des arts visuels, de la musique, des arts de la scène, et dont nous avons en ce moment même un si brillant exemple avec l'exposition Africa Remix qui remporte un très grand succès au Centre Pompidou et que je vous conseille.

Enfin - et ce sera le troisième chantier dont je vous parlerai pour terminer -, nous devons continuer à soutenir, partout à l'étranger, la diffusion de la création contemporaine de notre pays, tous domaines confondus, et appuyer résolument nos industries culturelles. Nous le ferons, bien entendu, avec le soutien de l'Association française pour l'action artistique (AFAA), avec laquelle nous défendons une programmation artistique de très haut niveau.

Il nous faut en particulier faire en sorte que nos intellectuels et nos chercheurs soient encore plus présents dans les grands débats d'idées au niveau international : nous allons d'ailleurs, dans ce but, nous doter d'un instrument moderne, avec le portail Internet "idées de France", qui vous a été présenté à l'instant et qui verra le jour cet automne.

Accompagnons, également, l'évolution de nos opérateurs audiovisuels extérieurs, TV5 et RFI, dans leur effort pour renforcer la place de la France et de la francophonie dans l'espace mondial de la communication. Dans ce domaine, soyons plus ambitieux ! La télévision et la radio sont désormais accessibles à tous sur des supports nouveaux, comme le téléphone portable. Il faut envisager tous les moyens de donner une nouvelle dynamique à nos outils d'influence. TV5 et RFI, comme tous les médias, notamment internationaux, ont le devoir de s'adapter aux marchés. Ils ont chacun des projets de développement et j'ai reçu récemment leurs responsables et je voudrais les remercier de leur esprit d'ouverture. Je prendrai le temps d'envisager avec eux ces nouvelles pistes, sans ignorer nos contraintes budgétaires, mais avec le souci d'être en phase avec notre temps et dont nous savons tous qu'il est aujourd'hui perpétuellement mobile et fluide. Il n'est pas possible de continuer à être une des composantes d'ajustement du budget année après année, car nous croyons que la diplomatie française a encore quelque chose à dire, - et elle a quelque chose à dire -, nous pensons que la diplomatie française est l'une des meilleurs au monde, - et elle est une des trois meilleures du monde. Lorsque je rencontre Condoleezza Rice et, sur tel ou tel sujet, le Moyen-Orient élargi ou l'Amérique du Sud, je lui donne des informations qu'elle n'a pas, ou lorsque je lis le "Washington Post" qui dit que la France est le pays au monde à avoir la meilleure action anti-terroriste associée aux États-Unis, et bien je pense qu'il faut conserver ce bien public, cette diplomatie française dont vous êtes le symbole.

Notre pays ne doit pas rater ce rendez-vous avec la modernité, car il en va de notre influence et de notre avenir. Si nous voulons que notre pays continue de faire entendre sa voix dans le monde, nous devons être ambitieux dans notre action, que ce soit dans le domaine de l'audiovisuel extérieur, de la culture, de la recherche, de la formation, de la coopération, de l'aide au développement, de la politique. Je suis un homme politique et je me revendique comme un homme politique. J'ai beaucoup de choses à apprendre sur le plan technique, certainement diplomatiquement, mais je sais qu'aujourd'hui un pays comme le nôtre, dans le moment que nous vivons, qui est historique, où le monde est en plein changement, c'est de la politique dont nous avons besoin pour défendre nos valeurs. C'est par ce chemin-là que nous ferons partager notre vision du monde, nos convictions et nos valeurs.

Merci./.