CONFÉRENCE DE PRESSE DU MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

"LA FRANCE DANS LE MONDE : CULTURE, LANGUE FRANÇAISE, ÉDUCATION ET DÉVELOPPEMENT"

(Paris, 15 mai 2006)

Je suis très heureux de vous accueillir ce matin afin de vous présenter le plan de relance de notre action internationale dans le domaine de la culture, de l'éducation, de la santé et du développement. Depuis mon arrivée au quai d'Orsay, j'ai beaucoup écouté le personnel du réseau de coopération et d'action culturelle, un réseau riche, je vous le rappelle, de ses 4 000 agents, composé de 150 centres et instituts culturels ainsi que de 220 alliances françaises partenaires. J'ai eu par ailleurs de nombreux contacts avec tous ceux - artistes, universitaires, scientifiques - qui travaillent avec les services de ce ministère pour diffuser la présence et l'influence de notre pays dans le monde. J'ai aussi constaté l'attachement des Français qui vivent à l'étranger pour notre réseau de lycées français et le capital culturel dont bénéficient nos établissements dans le monde. J'ai été frappé par la diversité des métiers et par la richesse des compétences : nous disposons d'outils incomparables d'influence et de rayonnement.

Mais une autre chose m'a frappé : si nous agissons dans de nombreux pays, si nous sommes présents dans de nombreux domaines, les retombées de notre action n'apparaissent pas toujours clairement. Et pourtant, les succès de nos entreprises et de notre réseau ne manquent pas : je pense, par exemple, à l'année de la France en Chine en 2005, qui a rencontré un très large succès populaire ou bien encore à la progression de plus de 10 % des effectifs des établissements français à l'étranger depuis quinze ans.

Demain, je pars en Israël inaugurer une saison culturelle française. La plupart d'entre vous, ici présents, savent qu'une saison culturelle de ce type est mise en œuvre en général par l'Association française d'Action artistique (AFAA), cher Olivier, qui dépend de ce ministère ; mais le grand public et l'opinion l'ignorent. En réalité, ce qui manque à notre politique culturelle à l'étranger c'est un label, c'est une signature, c'est en quelque sorte une marque de fabrique. Le travail est là, mais cela ne se sait pas suffisamment.

A l'occasion de la Conférence des Ambassadeurs, en août dernier, j'ai donc souhaité que l'on engage une réflexion sur les moyens de l'influence française dans le monde, et plus précisément sur la lisibilité et la visibilité de notre action en matière culturelle, scientifique, universitaire et technique. J'ai alors confié à Jacques Blot et Pierre Buhler – dont je salue ici la présence –  une mission de réflexion sur les moyens de clarifier notre action dans les domaines culturel et universitaire.

Depuis plusieurs années, d'importantes réflexions avaient déjà été menées et le plan que je vous présente aujourd'hui s'est donc nourri de plusieurs rapports importants et d'une large concertation avec les acteurs du domaine de la culture, de l'éducation et de la francophonie. Je tiens notamment à saluer ici les travaux du sénateur Louis Duvernois et du sénateur André Ferrand. Ce plan doit beaucoup à leurs conclusions et à leurs propositions ; ce plan est aussi la traduction d'un engagement clair du président de la République et du gouvernement de notre pays afin de renforcer notre action internationale autour d'objectifs partagés.

Enfin, je suis particulièrement sensible à la présence parmi nous, ce matin, de Fanny Ardant. Qui pouvait mieux que vous, chère Fanny, traduire le rayonnement de la France, de sa langue et de sa culture ? Qui pouvait mieux que vous incarner cette nouvelle ambition pour le français dans le monde ? Merci de votre présence.


Les chantiers de modernisation de l'action culturelle


Le premier chantier de modernisation dont je voudrais vous parler concerne nos outils d'influence dans le domaine culturel et artistique.

Certains de ces outils sont anciens puisque l'Association française d'Action artistique a été créée en 1922, et qu'elle a acquis au fil des années une expertise remarquable, dont elle peut s'enorgueillir à juste titre.

Quant à L'Association pour la Diffusion de la Pensée française, l'ADPF, elle est née en 1946 et a bâti sa réputation sur la qualité de ses publications littéraires et archéologiques.

Or, en dépit de leurs mérites et de leurs succès, force est de le reconnaître, ces associations demeurent encore mal connues. Depuis plusieurs mois, j'ai donc incité les responsables de l'AFAA et de l'ADPF à conjuguer leurs forces et à s'engager dans un mouvement de rapprochement. La fusion des deux associations amorcée en avril dernier est une première étape. Cette nouvelle structure, dotée d'un budget consolidé de 30 millions d'euros, s'est engagée dans la recherche d'une implantation unique, et entend conduire des opérations de grande ampleur. C'est un outil au service de l'Europe de la culture, au service de nos artistes qui veulent faire connaître leur talent à l'étranger et surtout au service de la diversité culturelle. L'apport de nouveaux partenaires financiers – je pense aux collectivités locales, aux fondations et au mécénat privé – sera facilité et je souhaite qu'il constitue l'une des priorités de la nouvelle structure.

La création de la grande Agence d'action culturelle internationale, souhaitée par le président de la République en 2002, est donc en bonne voie. Alors comment doit-on l'appeler ? Nous proposons ici CulturesFrance – puisque c'est ce nom que nous avons envisagé de lui donner – ce sera désormais un acteur incontournable du rayonnement culturel de la France à l'international. C'est mon premier message. Nous avons tout intérêt à regrouper toutes ces actions culturelles à l'étranger. J'ai été ministre de la Culture et de la Communication. Renaud Donnedieu de Vabres, avec lequel nous travaillons beaucoup sur ce sujet, a tout fait pour nous aider. Nous, cette maison, le ministère des Affaires étrangères, allons financer 90 % de ce dont je parle. Mais nous souhaitons que le ministère de la Culture soit partie prenante.

Ensuite, il faudra savoir ce que nous "mettons sur la table" les uns et les autres petit à petit en dehors de l'Agence, en dehors de l'ADPF, en dehors de l'AFAA, ou des quelques morceaux d'administration qui doivent venir pour créer cette grande agence. Après tout, il y a bien le British Council qui existe et le Foreign Office profite du British Council ! Il n'y a pas de raison que la France ne soit pas vue, Monsieur le Secrétaire général du Quai d'Orsay, et lue à l'étranger plus facilement qu'aujourd'hui. C'est mon premier message, c'est mon premier chantier de modernisation.


Le deuxième chantier est tout aussi fondamental. On en a beaucoup parlé récemment avec les lois sur l'immigration, mais je voudrais en parler un petit peu en sens inverse : c'est l'attractivité de la France. Je crois que l'attractivité dans nos établissements d'enseignement supérieur, c'est l'élément majeur aujourd'hui des chances de la France demain.

Dans un domaine marqué par une compétition internationale de plus en plus forte, il nous faut accroître l'attractivité de nos établissements d'enseignement supérieur. Je souhaite pour cela faciliter le parcours de tous ceux qui, toujours plus nombreux, souhaitent obtenir un diplôme d'études supérieures en France. La France doit être à même d'accueillir les étudiants étrangers : les étudiants étrangers, ce sont les élites de demain, ce seront les interlocuteurs de nos futurs dirigeants. Or chacun le sait, lorsqu'on parle la même langue et que l'on suit la même formation, c'est plus qu'un dialogue qui se noue, c'est aussi une confiance qui se crée, une culture que l'on nourrit en commun et peut-être surtout une mémoire que l'on partage à vie.

Là encore, nous avons la chance de pouvoir nous appuyer sur des opérateurs d'une grande compétence, qu'il s'agisse d'EduFrance ou d'ÉGIDE, qui travaillent en liaison étroite avec le ministère de l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche.

A ce dispositif viennent s'ajouter depuis quelques années les Centres pour les études en France (CEF), qui accueillent, qui orientent les étudiants désireux de poursuivre leurs études supérieures en France. Après avoir été testés dans une phase pilote en Chine, au Maghreb, au Sénégal et au Vietnam, ces centres ont vocation, parce que je le souhaite, à être généralisés : en 2007, plus des deux tiers des demandeurs de visas pour études pourront bénéficier de leurs services.

C'est dans ce contexte que s'inscrit la création d'un opérateur unifié, Campus France : il s'agit là de mettre en œuvre de manière concrète notre volonté d'instaurer un guichet unique au service de l'attractivité et de l'ouverture au monde de nos établissements d'enseignement supérieur. C'est un parcours du combattant pour un étudiant étranger que de vouloir suivre des études dans l'enseignement supérieur en France. Là il y aura un guichet unique, on ira à Campus France, où que l'on soit dans le monde, dans une ambassade, un consulat et les étudiants seront guidé vers le meilleur établissement pour eux. Ne nous y trompons pas : la mobilité scientifique et universitaire est un enjeu décisif pour l'attractivité de la France. Sur ce sujet, j'entends bien évidemment poursuivre l'excellente concertation menée activement avec le ministère de Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche. C'est bien évidemment celui-ci qui doit conduire en grande partie cela mais c'est à nous, dans nos consulats, dans nos ambassades, de faire ce guichet unique.

Le ministère des Affaires étrangères entend montrer l'exemple : je vais signer tout à l'heure avec Monsieur le Président, avec le groupe Thalès - je salue ici Denis Ranque -  un partenariat visant à mettre en place un ambitieux programme de bourses. Il concernera des étudiants de haut niveau, indiens et chinois dans un premier temps, en liaison avec deux Grandes Écoles (HEC et l'ESSEC) ainsi qu'avec le Pôle d'excellence formé par le groupement des écoles d'ingénieurs de Paris et de sa région ParisTech, dont le président est lui aussi parmi nous, je voudrais le saluer.

Reprenant les missions jusqu'ici exercées par Égide et États-unis, l'Agence Campus France sera donc un véritable aiguillon pour notre enseignement supérieur. Il favorisera, en liaison avec le ministère de Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, mais aussi avec la Conférence des présidents d'Universités et celle des Grandes Écoles, l'indispensable ouverture internationale des établissements. C'est à l'âge des études et dans le temps de la formation que se nouent les "grandes amitiés" ; c'est aussi là que se forment la sensibilité et la reconnaissance que l'on porte à un pays. Je suis très frappé de voir que la plupart des élites du monde n'ont qu'un seul but, c'est d'envoyer leurs enfants à UCLA, à Berkeley ou à Harvard. Ensuite, une fois que, évidemment, ces jeunes gens ou jeunes filles sont à Harvard, à UCLA ou à Berkeley, ils y passent cinq ans, ce sont les plus belles années de leur vie, ils se font des amis et lorsqu'ils rentrent dans leur pays, s'ils sont président d'une banque ou s'ils sont patron d'une grande entreprise ou s'ils sont ministre des Finances, eh bien ils appellent un de leurs anciens amis de UCLA, de Berkeley ou d'Harvard qui, lui, est resté aux États-unis ou qui est ailleurs et cela forme une sorte de fraternité à vie. Comme cela les États-unis deviennent un "pays monde", sans que l'on s'en rende compte, et nous avons tout intérêt, très vite, à réagir.

Dominique Wolton, que je salue ici, a écrit ce magnifique livre "Demain la Francophonie : pour une autre mondialisation", je vais en dire un mot maintenant. C'est un élément majeur, ne baissons pas les bras parce que, si nous baissons les bras, au niveau de l'attractivité de notre enseignement supérieur, c'est notre pays qui va plonger. Donc, nous avons là, certainement, une grande réflexion à avoir pour demain.


Le troisième chantier que je souhaite évoquer avec vous aujourd'hui concerne l'extension de nos lycées français à l'étranger parce que si vous n'apprenez pas le français à l'âge de 8 ans, 10 ans ou 12 ans, c'est quand même difficile de choisir HEC ou une université française à 18 ans.

Un très beau livre intitulé "La Leçon de français" a été publié, l'an dernier, par l'Agence pour l'Enseignement français à l'Étranger (AEFE).

D'anciens élèves, parmi lesquels Georges Steiner, Boutros Boutros Ghali ou l'actrice Jodie Foster, y évoquent leurs souvenirs d'études dans les lycées français à l'étranger. Tous soulignent combien leur passage dans ces lycées a été une expérience déterminante, creuset culturel pour les uns, refuge face à la censure politique pour les autres.

J'ai pu constater, lors de mes déplacements, l'importance que nos compatriotes expatriés attachent à la scolarisation de leurs enfants. C'est, pour eux, un sujet particulièrement sensible. En outre, les lycées français à l'étranger constituent un atout majeur pour la francophonie, Dominique, et pour l'influence de nos idées, de nos valeurs et de notre culture dans le monde. Je salue ici le travail du président Abdou Diouf, je vous remercie de le représenter aujourd'hui. C'est un capital éducatif, culturel, scientifique immense ; c'est aussi, dans bien des pays du monde, je le dis, une école de liberté et de tolérance.

Les contraintes budgétaires qui pèsent sur État ne doivent pas nous empêcher d'agir : j'ai donc souhaité lancer la construction de nouveaux établissements scolaires en encourageant les partenariats entre les secteurs public et privé, les fameux PPP. Des lycées pourront ainsi être construits grâce à des financements privés : ils s'inscriront dans le cadre d'une opération immobilière permettant à État de disposer d'un établissement conforme à ses attentes et à ses besoins pendant que l'opérateur privé pourra y trouver son compte à travers des réalisations immobilières et commerciales qui lui assurent l'équilibre financier du projet. Ces partenariats s'inscrivent donc clairement dans une logique de "gagnant-gagnant".

Une première vague de construction sera lancée à Munich, à Londres, à Tokyo et au Caire où les consultations sont déjà en cours. Je souhaite que d'autres projets suivent tout de suite : ainsi, une mission d'identification se rendra prochainement au Maroc. Je souhaite en particulier que nos établissements se développent dans des zones à fort potentiel de développement, à l'image de l'Inde ou des États du Golfe, notamment à Abou Dhabi. A Amman, un partenariat entre l'AEFE et le comité de gestion doit ainsi permettre de doubler la capacité d'accueil de l'actuel collège. A Brasilia, le projet de construction d'un nouvel établissement est à l'étude.

Je l'ai dit en posant la première pierre du lycée d'Ankara : si nous voulons affirmer avec force et encourager la diversité linguistique et culturelle dans le monde où nous vivons, cela a bien été notre très grand combat, d'ailleurs le président Chirac l'a affirmé à l'Unesco, et si nous souhaitons consolider les élites francophones à l'étranger, il importe de nous doter dès maintenant d'un réseau élargi, performant et moderne, notamment dans les grandes métropoles qui se développent si rapidement. Alors on ne peut pas vouloir d'un côté créer des lycées français et de l'autre ne pas donner un peu d'argent pour la promotion de la langue française.

La promotion de la langue française est naturellement associée à ce chantier. C'est une exigence pour le présent, c'est aussi un regard porté vers l'avenir. Le plan de relance du français, que je vous présente aujourd'hui, mobilisera près de 50 millions d'euros en 2006-2007. Il comprendra, par exemple, la création de "pôles pédagogiques de référence" au Maghreb, ce qui devrait permettre à terme de former dix mille enseignants de français. Cela ne sert à rien de dire qu'on va faire des lycées français si on ne forme pas des professeurs de français. Donc dix mille professeurs de français seront formés pour le Maghreb. Ce plan vise également à former quelque dix mille professeurs de français ailleurs dans le monde, en Afrique, en Asie et dans les grands pays émergents. A mes yeux, l'aire francophone n'est pas un espace figé, hérité du passé ; c'est un espace ouvert, une communauté de dialogue et de contact dont les frontières sont appelées à évoluer. J'y suis arrivé il y a une demi-heure d'Haïti pour l'investiture du président Préval. Toute une journée passée à Haïti avec tous les représentants des chefs État du monde, parlant uniquement en français. Nous avons un patrimoine exceptionnel que nous ne connaissons pas suffisamment.

Enfin, dans le cadre de ce même plan de relance du français, il s'agira de mettre au service de l'apprentissage et de l'enseignement des langues les nouvelles technologies de l'information et de la communication : la création de "portails régionaux", la réalisation de programmes éducatifs novateurs, avec TV5 et RFI, mais aussi la mutualisation d'outils de formation en ligne – je pense en particulier au rôle des "campus virtuels" – sont autant d'actions que nous entendons mettre en œuvre rapidement. Dans ce cadre, j'entends confier à Dominique Wolton une mission d'expertise pour faire un état des lieux et des propositions sur l'audiovisuel extérieur et le rôle qu'il pourra jouer en faveur du développement du français. Ces nouveaux outils de communication doivent permettre d'inventer de nouvelles passerelles pour l'accès à notre langue et à notre culture. Si l'on prend, Monsieur le Président, l'exemple de TV5, on peut penser faire, comme le disait récemment le président Abdou Diouf lors de notre entretien, des "maisons TV5" dans le monde, où il n'y aura pas uniquement la télévision mais aussi un comptoir où l'on pourra recevoir tous ceux qui voudront parler de culture et de langue française. Parce que nous voulons que la francophonie soit vivante et dynamique, il s'agit par ces initiatives de changer la donne, de passer d'une logique de "citadelle assiégée" à une logique de proposition. Plus qu'un passeur de mémoire, l'aire francophone doit désormais devenir un creuset de projets, un lieu de créativité, un chemin pour l'avenir.


Reste un quatrième chantier, celui du développement. C'est un secteur clé pour notre diplomatie. C'est aussi une priorité pour moi.

Nous sommes, aujourd'hui, confrontés aux défis les plus urgents, qu'il s'agisse de la faim, de la pauvreté, de la violence ou encore de la maladie. Il n'existe pas de pauvreté sans problème de santé publique. A ce titre en particulier, nous pouvons observer chaque jour le risque d'un approfondissement de la "fracture sanitaire" qui fragilise le développement autant qu'elle mine la stabilité des sociétés et la paix entre les États Je pense que c'est l'un des plus grands sujets de la diplomatie internationale et que l'on ne pourra pas continuer longtemps en laissant les 4/5ème de la population se partager 1/5ème des richesses sans système de santé publique. Je vois les grands titres sur Ceuta et Melilla. Qu'est-ce que Ceuta et Melilla ? Ce n'est rien d'autre qu'un début d'une vague de 30 mètres qui s'appelle l'immigration. Pourquoi ? Parce que l'instinct de conservation existe. Lorsque votre fils et votre fille meurent de tuberculose à côté de vous et que les antibiotiques existent depuis 1950, et que vous ne les avez pas, et qu'il faut faire 4000 km, eh bien vous les faites. Et ce n'est que le début. A ceux qui, pour des raisons purement égoïstes et scandaleuses, ne sont pas sensibles aux problèmes étiques et moraux, je dis qu'il faut alors qu'ils soient sensibles à leurs problèmes à eux parce que tout cela va évidemment aboutir à une déstabilisation de l'Occident. Et nous savons tous très bien qu'il y a aujourd'hui un certain nombre de gens qui sont au travail pour profiter du désespoir de ces jeunes et en particulier dans le sud, dans le Sahel et dans la bande sub-saharienne.

L'accès à la santé, on ne le dira jamais assez, est une condition indispensable au développement durable. On ne peut penser aujourd'hui le développement et l'action multilatérale sans prendre en considération la démocratisation de l'accès aux soins. Ce n'est pas une affaire de ministre de la Santé, c'est une affaire de chef État et de gouvernement au plus haut niveau.

Dans certaines régions du monde, l'enjeu sanitaire est aujourd'hui au cœur de toute action politique. Cette conviction rejoint, bien évidemment, les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) fixés par les Nations unies en 2000, grâce à Kofi Annan. L'ampleur considérable des défis dans ce domaine rend impérative la mobilisation de tous les acteurs. C'est dans cet esprit qu'est née l'idée de bâtir l'Alliance pour le Développement unissant, dans la lutte contre la maladie, les efforts de État et ceux de nombreux acteurs privés. Cette Alliance doit beaucoup aux idées et aux propositions du député Pierre Morange que je salue ici.

Deux grandes entreprises françaises, Sanofi Aventis, l'autre jour je parlais avec le patron de Sanofi Aventis, qui me dit "es-tu déjà allé en Afrique du Sud ? Et je lui dis "je vais y aller bientôt". "Sache qu'en Afrique du Sud, nous, Sanofi Aventis, avons fait un protocole d'accord avec le président Mbeki pour éradiquer la tuberculose d'Afrique du Sud". Très franchement, c'est Sanofi Aventis mais c'est aussi la France, il n'y a pas de raison, c'est une entreprise privée mais française et je me dis qu'il est dommage que le Quai d'Orsay, même si c'est État, même si c'est public, ne puisse pas s'associer à un privé pour dire que c'est la France qui est là. Chaque fois qu'il y a une catastrophe naturelle, chaque fois qu'il y a une catastrophe environnementale, regardez les tarmacs, ce sont toujours des avions américains qui arrivent en premier avec les drapeaux, pourquoi ce ne serait pas la France ou l'Europe qui serait là dans les 24 ou 48 heures ? Et, en plus, elle est là.

Quand je me suis rendu à Muzaffarabad, sur les lieux de cet horrible tremblement de terre au Pakistan, au milieu de plus rien, d'enfants qui n'avaient plus rien, de mères qui n'avaient plus rien, de pères affamés, je tombe sur quelques Français et je leur demande "qui êtes-vous ?", "nous sommes Veolia, et c'est nous qui sommes en train de mettre en place l'eau potable pour tout le quartier". C'est la France, Veolia, aussi et il n'y a pas de raison que le Quai d'Orsay ne s'associe pas non plus à Veolia sur des projets comme ceux-ci.

Et donc entre nos consulats, nos ambassades, qui sont présents chaque fois qu'on en a besoin dans le monde, et nos entreprises françaises privées, il m'a semblé intéressant de faire l'Alliance pour le développement, public-privé, y compris bien sûr avec le plus grand nom que nous ayons à l'étranger, le nom français qui est le plus connu, le plus prestigieux à l'étranger, c'est évidemment l'Institut Pasteur.

Celle-ci a vocation à s'élargir à d'autres secteurs et à s'étendre à d'autres partenaires. Elle s'engagera, dans un premier temps, dans la réalisation de trois projets pilotes : l'un concerne l'assainissement de l'eau et la lutte contre le paludisme à Madagascar, l'autre l'amélioration des conditions sanitaires dans les écoles du Niger ; le dernier concerne la lutte contre la dengue au Vietnam, où près de 80 000 cas ont été rapportés en 2004.

Ce sera là, je l'espère, la préfiguration d'une action d'envergure qui permettra :

  1. d'élargir le partenariat pour le développement,
  2. de renforcer la visibilité de la "Maison France" dans le domaine de la solidarité internationale,
  3. de souligner la responsabilité sociale qu'assument à l'étranger nos grandes entreprises,
  4. enfin, de développer un secteur d'excellence dans notre pays afin de promouvoir son image d'ensemble.

Il faut le redire avec force : l'aide au développement est un domaine où la France veut être à la pointe de la mobilisation, comme le démontre l'engagement du président de la République sur les financements innovants et comme l'a prouvé très récemment l'adoption par notre pays de la contribution de solidarité sur les billets d'avion. J'aurai l'occasion le 2 juin à New York, à l'Assemblée générale des Nations unies, en présence de Kofi Annan, de présenter le projet que le président Chirac et le président Lula ont inventé il y a quelques années et qui maintenant prend forme qui va être l'achat de médicaments à partir de contributions nouvelles pour pouvoir enfin payer des médicaments à ceux qui n'en ont pas


Voilà, Mesdames et Messieurs, ce que je comptais vous dire ce matin. Il s'agit à mes yeux de renforcer en profondeur nos moyens d'action et d'influence dans un monde globalisé, aux frontières mouvantes, aux crises, surtout, de plus en plus imprévisibles. Face à ce défi de la mondialisation, il s'agit d'adapter nos outils pour les rendre plus efficaces et plus crédibles. Le "désir de France" qui se manifeste nous oblige à l'innovation ; ce désir de France doit nourrir de nouveaux projets et de nouvelles ambitions. Au-delà, deux impératifs doivent ici nous guider : rendre notre présence plus lisible et plus visible et associer l'ensemble des acteurs français présents dans le monde - je pense aux universités, aux grandes écoles, aux grandes entreprises et à bien d'autres encore -  à l'action de État On a trop, dans notre pays, tendance à mettre État d'un côté et les autres de l'autre. Car la langue, la culture, l'éducation constituent les canaux pour lesquels nous devons aujourd'hui construire les échanges et les partenariats de demain.

J'invite maintenant Fanny Ardant, qui a bien voulu parrainer cette réforme, à me rejoindre pour vous dire quelques mots sur sa perception de notre présence culturelle dans le monde. Et sachez que cela fait huit mois que nous travaillons à cela, nous ne voulions pas faire une conférence de presse sur le premier chantier, une conférence de presse sur le deuxième chantier, sur le troisième, sur le quatrième. On voulait travailler pour vous présenter cela qui, à mon avis, n'est qu'un ensemble./.


 Doc:

Dossier de presse, 380.7 ko, 18x21 Dossier de presse (PDF, 380.7 ko)

J’entends donner à notre diplomatie une nouvelle ambition sur ces terrains. Dans cette perspective, j’ai décidé de mettre en œuvre plusieurs projets importants :
-  un nouveau dispositif afin de promouvoir, avec plus d’efficacité et de lisibilité, notre diplomatie culturelle : CulturesFrance ;
-  une nouvelle agence afin de simplifier notre dispositif d’accueil et renforcer l’attractivité de nos établissements d’enseignement supérieur : Campus France ;
-  un plan pour le développement du français dans le monde ;
-  un plan pour relancer la construction de nouveaux établissements d’enseignement à l’étranger, en associant de nouveaux partenaires financiers ;
-  la création d’une Alliance pour le développement pour rassembler les initiatives du secteur public et du secteur privé autour de projets communs de solidarité internationale.

 Doc:

Rapport présenté (...), 564.1 ko, 18x21 Rapport présenté par M. Buhler "Propositions pour une politique des mobilités universitaires" (PDF, 564.1 ko)

 Doc:

Rapport présenté (...), 97.7 ko, 18x21 Rapport présenté par M. Blot sur la création d’une agence qui regrouperait les moyens du rayonnement (PDF, 97.7 ko)