Deuxième partie

Pour une politique consulaire de lutte contre l'exclusion sociale (suite)

 

VI - POLITIQUE DE SANTE

 

    Il nous paraît souhaitable de distinguer plusieurs catégories de pays en fonction de l'environnement médical, de son coût et des caractéristiques de la communauté française.

      1) Pays en voie de développement à environnement médical public et privé convenables à des coûts proportionnés au niveau de vie de la classe moyenne pour le privé.
      ex : Afrique du Nord.

      2) Pays en voie de développement à environnement médical insuffisant et médecine privée hors de portée des Français à bas revenus.
      ex : Madagascar, pays du Sahel.

      3) Pays en voie de développement à environnement médical privé convenable mais dont les coûts sont hors de portée des Français à bas revenus.
      ex : Dakar, Abidjan.

      4) Pays d'Amérique Latine à environnement médical très onéreux.

     

    1. Pays en voie de développement à environnement médical convenable et financièrement accessible.

    C'est le cas de la Tunisie. L'offre publique et privée est de qualité. La classe moyenne et une partie de la classe intermédiaire bénéficient d'une assurance maladie locale ou de la CFE. Une partie des allocataires du CCPAS sont affiliés à la CFE. Deux axes pourraient être dessinés pour la politique locale du CCPAS.

      1) Création d'un fonds de roulement pour avance de frais à certains adhérents de la CFE ou d'assurance privée.

      2) Convention avec des médecins généralistes (Tunis et ville de province) pour des consultations à prix réduits et des fonds de secours occasionnels pour les hospitalisations et les examens liés aux pathologies lourdes, les soins dentaires et la lunetterie.

     

    2. Pays en voie de développement à environnement médical insuffisant.

    Ce sont Madagascar et les pays d'Afrique de l'Ouest - à l'exception des villes d'Abidjan et de Dakar -. Là, tous les obstacles se renforcent :

    · nombreux Français à très bas revenus

    · système de santé publique dégradé

    · médecine privée onéreuse

    · La solution résiderait dans une transformation des centres médicaux sociaux (CMS) de la coopération française en "centres médicaux sociaux consulaires". Fermer ces centres sans les réutiliser au motif de la déflation des assistants techniques serait une perte sèche d'investissements importants. Ce serait aussi, dans la plupart de ces pays, réduire à néant la sécurité sanitaire pour les Français, mais aussi pour les étrangers-tiers qui recourent actuellement au CMS, faute de solution alternative. Le CMS est, dans de nombreuses capitales, le seul lieu où les soins médicaux courants sont prodigués, mais aussi où la préparation d'une évacuation sanitaire peut-être réalisée dans des conditions sûres.

    Le CMS consulaire serait tenu, soit par un médecin volontaire international, soit par des médecins francophones recrutés localement et avec lesquels le CCPAS, qui exercerait la tutelle de l'institution, passerait une convention.

    Le CMS serait financé par les recettes suivantes :

      · adhésions individuelles

      · adhésions d'employeurs institutionnels pour leurs personnels (consulat, ambassade, AFD, ONG, écoles françaises)

      · adhésions effectuées par le consulat au profit des Français indigents

      · paiement des actes médicaux

    La tarification serait fixée sur la base de la médecine conventionnée en France. Une modulation pourrait y être apportée pour les Français qui n'ont pas d'assurance maladie. Les Français indigents n'auraient qu'un ticket modérateur symbolique à payer et les médicaments (génériques) pourraient leur être fournis gratuitement.

    Il ne devrait rester à la charge du CCPAS qu'un pourcentage de la rémunération des médecins et des personnels auxiliaires.

    Le CMS consulaire permettrait un progrès qualitatif dans l'accès à la santé de tous les Français à revenus intermédiaires et dépourvus d'assurance, ainsi que des plus pauvres : maladies chroniques prises en charge, protection maternelle et infantile, soins prodigués en temps utile.

      · Le CMS consulaire : une économie pour le CCPAS

    Le CMS consulaire représenterait aussi une économie pour le CCPAS car ses dépenses d'aide médicale, rationalisées, diminueraient. Le cas du CMS qui a fonctionné à Majunga (Madagascar) du 25 septembre 1997 au 28 février 1998 (5 mois) est significatif. Pendant cette période, le CCPAS a fait une économie de 2 millions de FMG (2 000 FF) par mois alors que le nombre global de consultations des bénéficiaires de l'aide médicale consulaire a augmenté. Les principaux bénéficiaires en ont été les enfants (154 consultations de pédiatrie) et 31 malades chroniques. Pendant ces 5 mois, 211 Français (soit 11,7 % des immatriculés) à très bas revenus ont bénéficié d'un réel accès à la santé tandis que les expatriés temporaires (volontaires d'ONG, assistants techniques, enseignants) ont vu leur sécurité sanitaire garantie.

    Il faut insister sur le faible coût des soins dans une telle structure. Hors rémunération des personnels, la prise en charge annuelle par le CMS de Tananarive des 14 agents malgaches du consulat et de leurs 10 enfants est évalué à 10 000 FF par an, médicaments, vaccins et examens divers compris, soit 417 FF par personne et par an.

      · Le CMS de Ouagadougou

    Bénéficiaires du CMS : le CMS de Ouagadougou a été largement ouvert aux Français résident par le biais de la mutuelle des Français du Burkina à laquelle adhèrent les Français pour bénéficier des soins au CMS. Ce système garantit la sécurité sanitaire aux 2 600 immatriculés (1 900 résidents permanents et 700 expatriés temporaires). En 1998, 550 Français de passage ont aussi été soignés au CMS. 58 familles franco-burkinabés bénéficient de la subvention de 12 000 FF allouée à l'association des familles franco-burkinabés pour le remboursement des frais médicaux.

      · Activités du CMS :

    Nombre de consultations

    - 3296 Français coopérants et assimilés (ONG reconnues, religieux fonctionnaires des institutions françaises, ambassade, pairie, AFD, etc.)

    - 1064 Français résidents privés (consultations dans le cadre de la Mutuelle des Français du Burkina, association d’usagers)

    - 550 Français de passage (touristes et hommes d'affaires)

    Nombre d'admissions de courte durée au CMS (moins de 48 h d'hospitalisation)

    - 27 Français coopérants et assimilés

    - 9 Français résidents privés

    - 42 Français de passage

    Nombre d'évacuations sanitaires

    - 23 Français coopérants et assimilés

    - 14 Français résidents privés

    - 32 Français de passage

      · Budget du CMS

    Le budget alloué par la coopération pour le CMS est de 200 000 FF/an pour son fonctionnement.

    Personnel : 1 médecin militaire détaché + 1 CSN + 1 infirmière sous contrat local coopération + 1 chauffeur.

     

    3. Pays en voie de développement à environnement médical privé convenable mais financièrement inaccessible aux Français à bas revenus.

    C'est le cas d'Abidjan et de Dakar.

    Un CMS consulaire du même type que celui précédemment décrit est nécessaire pour l'importante population de Français à très bas revenus de la communauté ( 3 000 à 4 000 personnes à Abidjan).

     

    4. Pays émergents d'Amérique Latine

    L'accès des Français d'Amérique Latine à la santé mériterait une étude particulière, car il serait risqué d'extrapoler le cas de Buenos-Aires à l'ensemble du sous-continent. La distorsion entre des niveaux de revenus très inférieurs à ceux d'Amérique du Nord et des coûts de santé au moins aussi élevés rend le problème de l'accès à la santé particulièrement aigu. La CFE n'a d’intérêt qu'avec assurance complémentaire, ce qui est trop cher pour une partie des Français. Il faudrait étudier, pays par pays, les possibilités offertes par les assurances privées locales et, dans la mesure du possible, négocier avec elles des conditions particulières pour les Français immatriculés.

 

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