1. Le Comité d'Entraide aux Français rapatriés
La structure d'accueil aux Français de l'étranger de retour en
France est le Comité d'Entraide aux Français Rapatriés (CEFR).
Fondé en 1940, il est régi par l'article 185 du code de famille
(accueil en centre d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS)),
le décret d'application n°76-526, article 46 qui prévoit, à l'alinéa
3, le cas des "personnes et familles sans logement, de nationalité
française, rapatriées de l'étranger", et de la convention de 1979
réunissant les ministères des Affaires étrangères, de la Santé
et de la Famille (MES actuel).
Le CEFR bénéficie du régime général de financement des CHRS par
le ministère de l'Emploi et de la solidarité et d'une subvention
du ministère des Affaires étrangères. Bien géré, il a pu améliorer
ses installations (le centre d'accueil de Vaujours, la maison
d'accueil pour personnes âgées dépendantes des Brulis, etc.) sur
ses fonds propres.
Le CEFR organise :
· l'accueil des rapatriés : bilan médical, évaluation de la situation
administrative et sociale, informations et conseils sur la vie
pratique,
· l'orientation des rapatriés à partir du Centre de Vaujours vers
l'un de ses 9 centres d'hébergement et de réinsertion sociale
(CHRS), vers un foyer spécialisé en vue d'une adaptation sociale,
ou une maison de retraite. Les foyers classiques ou en unités
éclatées assurent l'hébergement, le suivi administratif, l'adaptation
à la vie française, l'insertion professionnelle, l'aide à la recherche
de logement pendant une durée de 6 à 8 mois.
Sur environ 832 accueils effectués par le CEFR en 1997, 360 l'ont
été dans la tranche d'âge des 18-44 ans (dont 166 hommes et 194
femmes).
En dehors des crises politiques où les rapatriements collectifs
sont organisés par le ministère des Affaires étrangères avec le
concours du CEFR, l'aide au retour en France, dite "rapatriement",
peut être accordée pour motif " d'indigence", pour motif sanitaire,
pour formation professionnelle ou études. L'intéressé présente
une demande au consulat et constitue un dossier. Celui-ci est
examiné par la sous-direction de personnes de la DFAE au ministère
des Affaires étrangères. L'accord du CEFR est demandé s'il s'agit
d'un rapatriement sanitaire.
2. Le rapatriement pour indigence
Dans le cadre de ce chapitre, nous n'aborderons que le rapatriement
pour indigence pour évoquer les améliorations qui pourraient y
être apportées. Pour l'essentiel, il faudrait en faire évoluer
la notion dans un sens positif, assouplir et diversifier les procédures.
La référence à "l'indigence" qui provoque le départ, renforce
le sentiment d'échec du migrant. C'est une notion dévalorisante
qui prive le migrant de l'estime de lui-même et du dynamisme qui
en découle. Or, c'est de son dynamisme que dépend sa capacité
de réinsertion. Mieux vaudrait donc parler de "rapatriement en vue d'insertion sociale", terminologie tournée vers un avenir positif.
" serait alors proposé ou accordé sur leur demande à des personnes
encore jeunes, en difficulté grave mais non marginalisées, animées
par une forte motivation, un vif désir de progrès social. C'est
le cas de parents de jeunes enfants. Actuellement, on décourage
plutôt la demande au motif de la situation de l'emploi en France
et de l'incapacité présumée des demandeurs à s'adapter. Or l'expérience
prouve que des personnes qui ont connu des difficultés majeures
dans des pays pauvres sont prêtes à tous les efforts, une fois
en France, pour sauver leurs enfants. Le souci de la santé et
de l'éducation des enfants est la principale motivation des familles
rapatriées.
Un premier progrès a été accompli en novembre 1998 quand le CEFR
a été autorisé à accueillir, à leur arrivée en France, des familles
qui n'avaient pas bénéficié de l'aide au rapatriement par le ministère
des Affaires étrangères. Il faut se féliciter que la prise en
charge des frais de transport par le ministère des Affaires étrangères
ne soit plus une condition de l'accueil par le CEFR car cela écartait
les personnes les plus aptes à la réinsertion, celles qui ont
encore un emploi, des ressources, mais dont les perspectives d'avenir
à l'étranger sont trop mauvaises (salariés de droit local, femmes
seules avec enfants d'Europe, etc.).
Cette procédure directe ouvre une brèche dans le système trop
rigide du rapatriement pour indigence mais elle n'offre pas suffisamment
de garanties, tant pour les rapatriés que pour le CEFR. Dans tous
les cas où la prise en charge du voyage n'est pas nécessaire,
il faudrait privilégier une démarche de concertation où le service
social du consulat a un rôle à jouer. Le départ doit être préparé
tant sur les plans matériel que psychologique, surtout s'il y
a des enfants. Il faut que l'individu ou la famille soit bien
informé du parcours d'insertion tracé par le CEFR, que leur attente
soit réaliste, à bonne distance de l'épouvantail du "foyer social"
et du confort émollient d'une prise en charge intégrale et permanente.
Le CEFR devrait enfin pouvoir aider des personnes non démunies
mais dépassées par les démarches à accomplir. Cette fonction de
conseil pourrait être remplie par un agent détaché à la Maison
des Français de l'étranger, apte à conseiller les personnes elles-mêmes
ou les travailleurs sociaux qui les reçoivent en province.
Le CEFR a maintenant vocation à accueillir aussi des familles
moins démunies que celles qui sont rapatriées aux frais de l'Etat.
L'hébergement en CHRS n'est pas nécessairement adapté dans ces
cas. Il faudrait que le CEFR puisse développer le mode d'accueil
en ALT qui avait prouvé son efficacité lors du repli des Français
d'Algérie de 1994 à 1997.
Des appartements dont le CEFR est locataire sont mis à la disposition
de familles revenues en France, pour une durée de six mois éventuellement
renouvelable. Les familles sont admises à bénéficier de ce dispositif
après étude de leur cas et entretien d'évaluation. Elles doivent
acquitter la part du loyer qui n'est pas couverte par l'ALT. Elles
bénéficient d'un accompagnement social pour les aides sur le plan
administratif et social, pour obtenir l'ouverture de leurs droits,
les conseiller dans leurs projets d'investissement, le relogement,
pour les problèmes des enfants (santé, scolarité), etc. A la sortie
du dispositif ALT, les familles qui n'auraient pas retrouvé leur
pleine autonomie pourraient être aidées par le dispositif "suivi
logement" RMI ou FSL.
3. La coordination de l'accueil et de la formation professionnelle.
C'est actuellement le seul point faible du dispositif. Plusieurs
cas de figure sont à envisager et il peut être remédié aux carences
pour chacun d'eux.
· Les rapatriés du CEFR
Evacués ou rapatriés pour "indigence", leur situation au regard
de la formation professionnelle n'a pas été réglée en concertation
entre l' AFPA et le CEFR avant le départ du pays de résidence.
Alors que le CEFR ne les prend en charge que 6 à 8 mois, les délais
d'affectation de l' AFPA peuvent atteindre un an. Les rapatriés
n'ont donc pas le temps, pendant leur durée de prise en charge,
d'intégrer une formation. Pour le centre de Lyon, sur les années
96-98, seuls deux demandeurs ont pu être affectés à l'AFPA sur
103.
La directrice de ce CHRS parle à juste titre de "l'inaccessible
AFPA". Les rapatriés sont donc orientés vers des organismes de
formation linguistique car ils ont souvent des problèmes de maîtrise
du Français, puis ils sont aiguillés vers l'emploi. Leur situation
restera précaire puisqu'ils n'auront pas intégré un parcours de
qualification.
Il faut donc impérativement que la convention signée voici quelques
années entre le CEFR et l' AFPA, et restée lettre morte depuis,
soit activée et actualisée afin que l'AFPA réduise ses délais
d'attente à moins de 6 mois pour les rapatriés du CEFR.
Il faut aussi que des psychologues de l'AFPA interviennent au
centre d'accueil de Vaujours et que, localement, l'AFPA collabore
avec les CHRS pour les évaluations de compétence professionnelle
et les bilans psychotechniques.
La procédure MAE-AFPA permet de sélectionner les futurs stagiaires
AFPA dans leur pays de résidence soit par passation de tests au
consulat, soit par sélection lors d'une mission d'un psychologue
de l'AFPA. C'est la meilleure formule, mais elle n'a bénéficié
qu'à 11 personnes en 1997 et 15 en 1998. Il faudrait développer
cette formule dans trois directions :
a) systématisation de la passation des tests AFPA lors de la préparation
du rapatriement dans le pays de résidence, afin de réduire les délais d'accès
au stage lors de l'arrivée en France, et accroissement, dans les
pays de résidence, des missions d'orientation et de sélection
financées au titre de la commande publique.
b) augmentation du nombre de bénéficiaires au titre de la formation
professionnelle de la procédure de rapatriement. Accorder le bénéfice du rapatriement, et donc l'accès au CEFR,
à tout futur stagiaire AFPA de moins de 25 ans, sans référence
antérieure d'emploi, dont la famille ne peut assurer le complément
de financement de 1 000 F/mois pendant la durée du parcours de
formation et d'insertion (12 mois). Ces stagiaires bénéficieraient
d'un complément de rémunération de 1 000 F/mois.
c) facilitation de l'accès au CEFR de stagiaires de 26 ans et plus,
non bénéficiaires de la procédure de rapatriement pour :
· l'accueil initial.
· l'accueil inter-stage pour les stagiaires effectuant un parcours
de formation AFPA (stage préqualifiant, stage diplômant) et cela
pour une durée de 3 mois avec un module de formation organisé
par le CEFR pour tirer le meilleur parti de cette période d'attente.
· l'accueil post-formation lié aux actions d'insertion ( 3 mois
maximum).
· Baisse du nombre de stagiaires AFPA
Le nombre de stagiaires AFPA en provenance de l'étranger a chuté
entre 1994 et 1998 de 148 à 22. Cela est dû à une baisse de la
proportion d'admis aux tests AFPA, comme en témoigne le tableau
ci-dessous.